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Sommaire

I. LES DIMENSIONS ÉCONOMIQUE ET SCIENTIFIQUE DE LA GUERRE
A. LA DIMENSION ÉCONOMIQUE DU CONFLIT
1. La mobilisation industrielle pour la guerre totale
2. L’évolution de la structure de la main-d’œuvre
3. La guerre économique
B. LA DIMENSION SCIENTIFIQUE DU CONFLIT
1. Modernisation de l’armement et de la technologie militaire
2. Modernisation des moyens de communication

II. LES CIVILS DANS LA GUERRE
A. LA VIOLENCE SUBIE PAR LES CIVILS
1. Invasion, occupation, retraite et rupture des cadres sociaux
2. Bombardements
3. Le génocide des Arméniens
B. LA MOBILISATION DES ESPRITS : CE QUE LA GUERRE FAIT AUX HOMMES
1. Des sociétés encadrées
2. Des sociétés transformées
C. LES CRISES DE L’ANNÉE 1917
1. Les raisons des crises et leurs manifestations
2. La solution : des gouvernements forts

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Manuel p.276-303

Problématique p.276-277 + Chronologie p.279- Ce chapitre est consacré à ces « non-militaires » trop souvent négligés au profit de l’approche, indispensable mais réductrice, de la seule expérience combattante de la Première Guerre mondiale. La caractéristique de l’activité guerrière au XXe siècle est en effet d'être animée par une logique totalisatrice. La Grande Guerre ne se distingue pas seulement par son extension et son intensité, mais aussi parce qu’elle brouille la frontière entre ceux qui portent les armes et ceux qui ne les portent pas. À l’ère des armées de masse et de la guerre industrielle, l’ensemble de la population participe à la mobilisation : civils mis sous l'uniforme, ouvriers et ouvrières des usines d'armement, populations mobilisées mentalement pour la défense du pays...

Partie intégrante de l'effort de guerre de l'ennemi, les civils sont une cible potentielle de la violence de guerre. Le blocus économique, le bombardement des villes, le traitement des populations occupées réduisent la distinction entre front et arrière. Les buts de guerre ne font désormais plus seulement prévaloir la victoire militaire ; ils ont tendanciellement pour horizon la destruction complète de l’ennemi.

Il en résulte que la guerre totale[1] dont nous parlons est irréductible à ses seules dimensions militaires et diplomatiques. En effet, le processus de totalisation ne découle pas de la seule croissance de la capacité meurtrière des armes ; il résulte fondamentalement de la disposition des sociétés à investir toutes leurs ressources (intellectuelles et matérielles) dans leur production et dans leur usage. C'est précisément cela qui incite à recourir à la notion d'expérience, qui permet d'analyser la guerre non pas comme phénomène exogène aux individus et aux sociétés, mais comme « état collectif » qui met enjeu les systèmes de valeurs et de normes, les représentations ct les imaginaires des acteurs. L'interrogation porte alors sur les modalités selon lesquelles les vécus et les pratiques de et dans la guerre sont dotés de sens, et trouvent place dans les systèmes de représentations et de valeurs qui encadrent l'expérience individuelle et collective, singulièrement dans l'appropriation de la violence extrême et dans l’accommodement à celle-ci.

Comment les civils vivent-ils des phénomènes aussi divers que la mobilisation, la résistance, l'oppression parfois, la souffrance toujours ? Comment la brutalité modifie-t-elle leurs comportements et leurs représentations ?

I. Les dimensions économique et scientifique de la guerre

Durant le premier conflit mondial, la stabilisation du front dès la fin de l’année 1914 marque l’entrée dans une guerre longue qui exige une intense mobilisation en hommes et en matériel, qui fait de la mobilisation des appareils productifs un enjeu stratégique majeur : pour leur équipement (armement, vêtement...), leur ravitaillement et leur transport, les armées dépendent étroitement des ressources et des capacités de l'arrière. Le travail des civils et son organisation, particulièrement dans les industries de la défense nationale, deviennent des facteurs primordiaux dans la conduite de la guerre. La mutation de la forme de la guerre amène la constitution de ce que les contemporains de la Grande Guerre nommèrent le « front de l’arrière » (Home Front, Heimatfront) -Front intérieur. Vocabulaire p.283, constitué d'abord en front de la production. Sur ce front, la main-d’œuvre est mobilisée et les appareils de production sont reconvertis[2].

A.    La dimension économique du conflit

La guerre qui s’allonge coûte cher, et oblige les belligérants à trouver de nouvelles ressources. L’émission excessive de monnaie provoque l’inflation -Vocabulaire p.282 + info p.283 : en plus de cette solution, les États ont donc recours à l’impôt -Le saviez-vous ? p.283, mais aussi aux emprunts extérieurs[3], ainsi qu’à l’épargne publique[4].

1.     La mobilisation industrielle pour la guerre totale

Alors qu'au début du conflit, rien n'avait été prévu pour organiser l'économie puisqu’on estimait que la guerre serait courte, la guerre économique contraint chacun des États à intervenir dans la vie économique et sociale. L'Allemagne, la plus menacée, est la première à mettre en place une économie de guerre -Vocabulaire p.282 sous la direction de l'industriel Rathenau. Mais tous les autres belligérants l'imitent, en créant de multiples offices à la tête desquels sont placés des financiers, des industriels, des ingénieurs. En France, par exemple, c'est l'industriel de l'électricité Ernest Mercier qui conseille le gouvernement pour ses contrats, le sidérurgiste Schneider qui coordonne les industries d'armement, le fabricant d'automobiles Citroën qui répartit les matières premières.

Pour pallier la grave crise de munitions qui, à l'automne, frappe toutes les armées, la production manufacturière est orientée prioritairement vers la fabrication de matériel de guerre. La reconversion des capacités de production et la construction de nouvelles usines doivent permettre de répondre aux besoins croissants des armées.

Progressivement, tous les domaines de la vie économique passent sous le contrôle de l'État. Tout d'abord, le commerce extérieur : importations, exportations, changes sont contrôlés ; les flottes marchandes sont réquisitionnées. L'État dirige la répartition des matières premières, qu’il rationne, tout comme les denrées alimentaires. Pour assurer les fabrications de guerre, il lui faut se préoccuper du recrutement de la main-d’œuvre et donner des crédits aux industriels. Pour éviter les crises, il doit fixer les prix, surveiller les salaires et les conditions de travail. À la fin du conflit, l'État est devenu le principal acheteur de l'économie nationale et son maître d’œuvre. Mais, partout, on considère qu'il s'agit là d'une parenthèse que la fin du conflit refermera.

2.     L’évolution de la structure de la main-d’œuvre

L'emploi des travailleurs étrangers et coloniaux ne permettant pas de satisfaire la demande, le recours à l'embauche des femmes s'impose. Pour beaucoup d'entre elles, il ne s'agit pas d'une entrée sur le marché du travail : elles travaillaient déjà dans le secteur agricole et, aussi, dans l'industrie. En revanche, elles accèdent à des emplois traditionnellement réservés aux hommes. La munitionnette -Vocabulaire p.283 devient le symbole de la mobilisation du front de l'intérieur (mais aussi des revendications féministes -doc.1 p.294. Les femmes à l’usine), alors qu’auparavant, les usines d’armement n’employaient pas de femmes et les entrepreneurs, privilégiant le rappel des ouvriers mobilisés et la main-d'œuvre étrangère ou coloniale -Sujet bac p.302-303. La féminisation de la main-d'œuvre industrielle[5] -Chiffres-clés p.283 ° Info p.294 accélère la mécanisation et la rationalisation du travail industriel, modifiant en profondeur et sur le long terme l'expérience ouvrière.

3.     La guerre économique

Dès la déclaration de guerre, Anglais et Français ont mis les côtes allemandes en état de blocus -Vocabulaire p.280, afin d’asphyxier l'économie allemande qui ne peut vivre sans importations de denrées alimentaires et de matières premières. À partir de 1915, le blocus naval devient de plus en plus efficace, rendant dramatique la situation économique des Empires centraux à partir de la fin 1916. L'incapacité à assurer le ravitaillement, le développement du marché noir minent la légitimité de l'État allemand. L'année 1916-1917, marquée par « l'hiver des navets » (ou des rutabagas), marque un tournant dramatique avec l'institution d'un rationnement sévère sur la base de 1300 calories par jour pour un travailleur -Tickets de rationnement p.282, particulièrement dur pour ceux qui n’ont pas les moyens de s’approvisionner au marché noir -Vocabulaire p.283. Près de 750 000 décès civils sont imputables à la sous-alimentation et à ses conséquences.

L'Allemagne réplique au blocus en déclenchant dès 1915 la guerre sous-marine -Vocabulaire p.256 : tout navire ennemi ou neutre se trouvant dans les eaux britanniques doit être coulé par les sous-marins allemands. Cette mesure touche particulièrement le fructueux commerce des États-Unis avec les pays de l'Entente[6], davantage encore à partir de 1917, avec la guerre sous-marine à outrance -Chiffres-clés p.256. Mais l'organisation des transports maritimes par les Alliés (escorte assurée par des navires de guerre), la mise en place de parades efficaces (filets empêchant la sortie des sous-marins de la rade de Kiel) et surtout l'appui de la flotte américaine à partir d’avril 1917 (entrée en guerre des États-Unis, conséquence de… la guerre sous-marine à outrance), condamnent le plan allemand à l’échec.

B.    La dimension scientifique du conflit

La période de la Grande Guerre connaît de grandes avancées dans le domaine des sciences (médecine et chirurgie, mais aussi sciences physiques, mathématiques et chimie). Dès le début de la guerre, comme le reste de la population, les savants et les scientifiques sont mobilisés par les différents gouvernements et participent activement au conflit[7]. Parmi eux, on peut citer Max Planck[8], Albert Einstein[9], sans oublier Marie Curie (prix Nobel de physique 1903, prix Nobel de chimie 1911), qui met sa science au service des blessés et s’implique elle-même dans le conflit -PDP#28 p.290-291. Marie Curie dans la guerre

1.     Modernisation de l’armement et de la technologie militaire

a.       Les armes à feu

Les armes à feu individuelles se multiplient, à la fois en diversité et en efficacité. Hormis le fusil Lebel français, dont le modèle date de 1886 et qui apparaît vite inadapté au combat des tranchées, une multitude d’armes connaissent des perfectionnements continus : pistolet-mitrailleur, mitrailleuses, grenades et lance-grenades. Toutes ces armes constituent un véritable « mur » pour les fantassins à l’assaut, qui subissent par ailleurs les pilonnages d’une artillerie de plus en plus efficiente.

b.      L'artillerie

L’artillerie connaît des progrès considérables au cours de la Première Guerre mondiale, car la guerre de position nécessite des armes plus lourdes pour détruire les lignes ennemies avant de lancer l’assaut. Située en retrait du front, elle utilise des quantités de projectiles fantastiques[10]. Parmi les armes d’artillerie emblématiques de la Première Guerre mondiale, on peut citer « la Grosse Bertha » et « le Canon de Paris » utilisés par les Allemands[11]. L’artillerie cause d’environ 75% des dégâts physiques et des victimes de la Grande Guerre -sans compter les traumatismes psychologiques provoqués par les bombardements.

c.       Le lance-flammes

Les lance-flammes sont utilisés pour la première fois durant la Première Guerre mondiale. Cette arme terrifiante lance un liquide ou un gaz (pétrole ou azote) mis en flamme. Elle est portative avec un long tuyau relié à un réservoir fixé dans le dos. Le lance-flammes est créé en Allemagne en 1910, à la demande de l’armée. Il est en général utilisé pour « nettoyer » la tranchée ennemie[12].

d.      L'aviation

Les dirigeables d’observation sont largement employés pour repérer les positions et mouvements ennemis mais ils sont rapidement dépassés par les avions, plus rapides, plus mobiles et moins repérables. De plus, les avions peuvent être chargés d’obus qui sont lancés sur les lignes ennemies. Parallèlement, certains pilotes s’équipent d’armes à feu afin de tirer sur les ennemis rencontrés dans les airs[13]. L’affrontement direct entre avions franchit un palier avec l’installation d’une mitrailleuse dans l’engin, avec la possibilité de tirer au travers de l’hélice : c’est la naissance des avions de chasse[14]. Les Britanniques sont les premiers à créer une armée de l’air autonome et détachée du commandement de l’armée de Terre, la Royal Air Force, bientôt imitée par la France au printemps 1918[15]. Le bombardement par voie aérienne prend aussi de l’ampleur grâce à la mise au point d’appareils plus gros, bimoteurs ou quadrimoteurs, qui peuvent transporter de lourdes charges de bombes[16].

e.      Les chars

L’idée du « tank » remonte au début des années 1890 mais elle ne se développe qu’avec l’enlisement dans la guerre de position. C’est dans ce contexte que les chars sont développés, pour leurs qualités de puissance de feu doublée de la protection qui permet ainsi de s’approcher de la tranchée ennemie. Les travaux du Canadien C. J. Lynde sur la résistance des métaux aideront à développer les premiers chars d’assaut britanniques. Basés sur un système de chenilles pour circuler sur tout type de sol et franchir les tranchées, les Mark I sont équipés de mitrailleuses et de lourdes plaques de blindage. Mais ils révèlent rapidement des carences, car ils sont très lourds, lents, vulnérables sur leurs angles, et ont une trop faible autonomie, comme on l’a vu lors de la bataille de la Somme où ils échouent à permettre la percée. Plus tardif, le char léger français FT-17 est une véritable révolution : équipé d’une tourelle de tir, il incarne le concept du « fantassin blindé », armé d’une mitrailleuse de 8 mm ou d’un canon de 37 mm. Les premiers FT-17 sont commandés à Renault en mars 1917, et ils sont massivement utilisés lors de la contre-attaque des Alliés de 1918.

f.        La guerre navale

Les décennies qui ont précédé la guerre connaissent des progrès inédits dans la métallurgie et la construction de moteurs de plus en plus puissants, de navires toujours plus grands, plus rapides, mieux armés et désormais blindés. C’est le Royaume-Uni qui possède la plus grande flotte de surface[17], alors que les Allemands, quant à eux, développent plus particulièrement leur flotte sous-marine. Alors que la Royal Navy établit le blocus des ports allemands, l’Allemagne développe sa flotte de sous-marins, les U-Boot… mais se heurtent au développement des systèmes de détection des sous-marins par ultrasons. Le physicien Robert W. Boyle a contribué à mettre au point l’ancêtre du sonar, suivi dans ses efforts par le français Paul Langevin. Les redoutables U-Boot allemands font néanmoins de nombreuses victimes, notamment civiles, et constituent un trait majeur de la Grande Guerre.

g.       Les gaz

La mise au point et l’utilisation des gaz de combat constituent aussi l’une des innovations de la Grande Guerre : chlore, phosgène, ypérite, gaz moutarde[18]… Les estimations comptent environ 112 000 tonnes de produits chimiques qui auraient alors été utilisées, causant la mort de près de 500 000 hommes. La France utilise dès le début du conflit des gaz lacrymogènes, mais c’est l’Allemagne qui est la première à employer systématiquement des gaz dangereux et létaux, malgré les conventions internationales de La Haye qui interdisaient leur emploi. Grâce aux masques à gaz, sans cesse perfectionnés, les gaz de combat auraient causé « seulement » 4% des morts. Ils n’en demeurent pas moins la hantise des combattants et représentent une importante source d’angoisse qui aggravera les traumatismes psychologiques.

2.     Modernisation des moyens de communication

La Grande Guerre est le premier conflit au cours duquel les télécommunications militaires ou diplomatiques prennent une telle dimension stratégique.

a.       Guerre des ondes

Les progrès accomplis avant 1914 sont poursuivis et approfondis dans le contexte de la guerre : bien que les pigeons continuent d’être largement utilisés, le 8e Régiment français du génie perfectionne la télégraphie sans fil et crée des appareils toujours plus innovants. C’est également pendant le conflit que sont inaugurées des stations radio capables de communiquer avec les colonies, avec les Alliés, avec les navires et tous les postes importants de commandement de l’armée.

b.      Guerre des câbles

Sur le front, il s’agit de disposer un réseau de câbles permettant les communications entre le haut commandement et la première ligne. Des milliers de kilomètres de câbles sont ainsi posés à travers les réseaux de tranchées. La pose et les nombreuses réparations des câbles sont un travail très dangereux qui fait de nombreuses victimes.

Le réseau britannique de câbles sous-marins est le premier au monde depuis les dernières décennies du XIXe siècle. Les communications britanniques restent ininterrompues pendant la Première Guerre mondiale, alors que les Anglais parviennent rapidement à couper le réseau mondial allemand.

c.       L’essor de la cryptographie, enjeu stratégique de plus en plus reconnu

Au cours de la Grande Guerre, les communications entre les états-majors, les postes de commandement et la ligne de front, essentiellement par radio, sont facilement « interceptables » par l’adversaire. C’est dans ce contexte que la cryptologie voit le jour (aussi appelée « le Chiffre »)[19].

II. Les civils dans la guerre

Les sociétés sont transformées par le conflit. En envoyant au front des millions d’hommes, qui sont autant de pères, de frères ou de fils, la guerre a séparé les familles. Il faut les remplacer au travail, mais aussi apprendre à vivre avec leur absence et leurs rares permissions, à maintenir le lien par les courriers[20].

A.    La violence subie par les civils

1.     Invasion, occupation, retraite et rupture des cadres sociaux

a.       Invasion

Pour les civils, l'invasion constitue un moment de particulière vulnérabilité. Leurs personnes, leurs espaces de vie et leurs biens sont exposés aux opérations militaires. Ils deviennent la cible de violences délibérées exercées par les troupes d'invasion. Exécutions, viols, prises d'otages s’accompagnent de pillages et de saccages[21]. Sur tous les fronts de la Grande Guerre, les populations civiles ont été exposées à cette violence d’invasion. Par exemple, dès août 1914, dans la petite localité belge de Dinant, les exécutions de masse et l'emploi des civils comme boucliers humains par l’armée allemande entraînent le décès de 674 personnes, soit 10% de la population totale. La destruction des bâtiments publics, et des richesses patrimoniales accompagne l'anéantissement presque total de la ville.

Ces violences d'invasion conjuguent, d’une part, l’expérience de vulnérabilité physique éprouvée par les combattants et une représentation profondément anxiogène des populations ennemies et, d'autre part, un vécu de puissance, lié au port des armes, et d'impunité, induit par l'effondrement des normes ordinaires de contention de la violence. Effroi et violence sont alors retournés contre les civils désarmés.

b.      Occupation

Suite aux invasions, des populations se retrouvent prisonnières dans leur territoire, en Belgique, dans le nord de la France, dans les Balkans ou encore dans les territoires ukrainiens et biélorusses. L’occupation est brutale. Pour la majorité des Européens des territoires envahis ou des pays vaincus, le vécu d'occupation constitue un aspect central de l’expérience de guerre. Or, à l'ère de la guerre totale, l'occupant ne se contente plus seulement d'assurer la sécurité et le ravitaillement de ses troupes : l'occupation n'échappe pas à la logique de totalisation :

  • La captation des ressources des territoires occupés prend désormais un caractère systématique et atteint en profondeur non seulement le fonctionnement économique des sociétés occupées mais aussi les conditions d'existence voire la possibilité même de survie des occupés. Ainsi, les populations occupées belges et françaises endurent de graves privations alimentaires.
  • Le travail forcé constitue un des aspects décisifs de l'exploitation des territoires occupés. D'octobre 1916 à février 1917, 61 000 travailleurs belges sont ainsi contraints d'aller travailler en Allemagne ; depuis Lille, ce sont 15 000 femmes qui sont envoyées de force en Allemagne[22].
  • L'occupant investit profondément la vie sociale des territoires occupés. La présence et le pouvoir de l'ennemi s’expriment d'abord par le contrôle de l'espace, indifféremment public et privé.
  • Dès 1914, les déplacements forcés de population -Déportation. Vocabulaire p.280 constituent un autre des jalons du processus de totalisation de l'occupation.

c.       Retraite

Les phases ultimes des conflits et, singulièrement, les périodes de retraite doivent également être isolées. Les violences frappent alors une population déjà durement éprouvée par les privations et les souffrances liées à la guerre et à l'occupation. En 1918, la retraite allemande fut ainsi marquée, en France et en Belgique, par des destructions de grande ampleur et par de nouvelles déportations de civils.

2.     Bombardements

De la source à l’histoire p.296-297- Pendant la Grande Guerre, le passage à la guerre de position tend à limiter le débordement sur les civils de la violence de combat. Mais là aussi, la radicalisation de l'activité guerrière induit une porosité croissante comme en témoignent l'intensité et la nature des dommages subis par l'arrière-front. Aux destructions strictement liées aux opérations militaires s’ajoutent en effet des dévastations visant non seulement à gêner les troupes adverses, mais aussi à interdire une reprise rapide de la vie civile. En 1918, la ville de Lens est détruite méthodiquement : les troupes allemandes font exploser habitations, infrastructures urbaines et installations minières[23].

Les bombardements d'artillerie à longue distance et les premières attaques aériennes tendent également à altérer la distinction entre espace de combat et espace civil. Les canons lourds qui bombardent Paris du 23 mars au 9 août 1918 font 256 victimes et 625 blessés, alors que les bombardements, par zeppelin dès 1914, puis par avion, font 267 morts et 602 blessés -Le saviez-vous ? p.281. Au printemps 1917, les premiers bombardiers de l’armée allemande conduisent des raids contre les quartiers industriels de Londres (1 414 morts et 3 416 blessés parmi les civils britanniques), témoignant d'un franchissement de seuil décisif, perçu comme tel par les contemporains[24].

3.     Le génocide des Arméniens

PDP#29 p.288-289. 24 mai 1915. La déclaration de la Triple Entente à propos des « crimes contre l’humanité et la civilisation » perpétrés contre les Arméniens de l’Empire ottoman- Le 9 décembre 1948, l'Assemblée générale des Nations unies adopte la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide -Vocabulaire + histoire de mots p.280. Sont ainsi désignés les actes « commis avec l’intention de détruire, totalement ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Le terme a été créé en 1944 par Raphael Lemkin. En 1921, il suit le procès de Soghomon Tehlirian, l’assassin de Talat, ancien ministre de l'Intérieur turc, et découvre alors l'impunité totale dont avait bénéficié le principal responsable du génocide arménien. Le jeune étudiant en linguistique de l'université de Lvov, en Pologne, s'engage alors dans des études de droit et décide de se consacrer à la reconnaissance juridique de ce type de crime : son itinéraire fait le lien entre les deux génocides de la première moitié du XXe siècle.

a.       Aux origines du génocide

Les Arméniens -Vocabulaire p.280 de l'Empire ottoman, dont le nombre est estimé à 2,6 millions en 1882, forment les deux tiers d'un peuplement étendu au XIXe siècle du Caucase russe aux territoires azéris de la Perse. Dans l'Empire ottoman, les Arméniens représentent plus de 10% de la population totale, au milieu d'une mosaïque de tribus et de peuples musulmans[25].

La situation de cette minorité longtemps tenue pour la plus fidèle à l'Empire ottoman, se dégrade à mesure que l'Empire perd ses provinces européennes et que le régime bascule dans la tyrannie politique, la haine des « infidèles » et la racialisation des « ennemis » de la « turcité ». En 1894-1896, de grands massacres sont ordonnés par le sultan dans les départements à majorité arménienne et dans la capitale Constantinople[26]. Les Arméniens sont tenus par de nombreux idéologues nationalistes comme responsables des pertes territoriales et de la contestation libérale du régime. Ceux-ci prônent un retour aux origines turques et exaltent une pureté raciale (plus encore que religieuse) fantasmée mais brandie avec la caution de médecins idéologues. Le succès de la révolution jeune-turque de 1908 à laquelle contribuent fortement les élites intellectuelles et les responsables arméniens, donne l'illusion d'une possible démocratisation de l'Empire, mais un nouveau grand massacre est perpétré à Adana en avril 1909. Lors des guerres balkaniques à partir de 1912, les Arméniens sont toujours désignés comme les premiers responsables des malheurs de l'Empire.

Le coup d'État de 1913 permet aux « unionistes » d'instaurer un régime dictatorial à l’idéologie anti-arménienne, qui se dote d'instruments militaires contre les « ennemis intérieurs » : l'Organisation spéciale (OS). En novembre 1914, l'alliance avec les Empires centraux et l'offensive déclenchée contre la Russie radicalisent encore davantage les unionistes.

b.      La Première Guerre mondiale, contexte et prétexte pour le génocide

Chronologie p.214- L'échec de l'offensive de Sarikamis le 4 janvier 1915 face aux Russes décide les dirigeants unionistes, dont le ministre de l'Intérieur Talaat Pacha, à orienter la guerre contre « l'ennemi intérieur » -doc.2 p.286. Le processus génocidaire : la transmission des ordres. La décision est prise fin mars 1915 d'appliquer un plan d'extermination, sous couvert de la déportation des Arméniens afin, officiellement, de les éloigner des zones de front. La loi provisoire de déportation du 26 mai 1915 ne fait alors qu'entériner un génocide planifié et réalisé depuis plusieurs mois déjà, visant la destruction complète des Arméniens ottomans comme le démontrent les télégrammes du ministre de l'Intérieur Talaat Pacha à ses gouverneurs.

Mi-avril 1915, les premières opérations de tueries massives débutent dans la région de Van. Jusqu'en août, plus d'un million d'Arméniens sont déportés dans 306 convois. Les régions de peuplement arménien sont vidées de leurs habitants dont la spoliation des biens, décidée par la loi provisoire du 13-26 septembre 1915, aboutit à une redistribution du capital économique. À Constantinople, des centaines d'intellectuels et de notables sont raflés, déportés et mis à mort à partir du 24 avril 1915.

Doc.1 p.286. Les lieux du génocide arménien- La déportation à des fins d'extermination constitue la première des deux principales phases de la destruction des Arméniens par le régime unioniste. Les pratiques de mise à mort sont nombreuses et souvent terrifiantes, depuis l'élimination « naturelle » des plus faibles sur des routes arides et surchauffées, jusqu'aux assassinats systématiques dans les sites-abattoirs de l'OS (comme à Malatya) en passant par les exactions des gendarmes, des voisins musulmans, des bandes kurdes.

La deuxième phase de la destruction s'opère à partir d'octobre 1915 dans la vingtaine de camps de Syrie et de Mésopotamie où aboutissent les rescapés des marches de la mort -doc.4 p.287. Le témoignage d’un rescapé. Aucun ravitaillement n'est apporté aux déportés qui sont dépourvus d'abris, l'objectif des génocidaires étant de poursuivre leur œuvre de destruction par la faim, la soif, l'épuisement et la maladie. Après une nouvelle défaite sur le front extérieur (Erzurum, février 1916), la liquidation des derniers Arméniens encore présents en Anatolie ou internés dans les camps est décidée -Chiffres-clés p.287.

B.    La mobilisation des esprits : ce que la guerre fait aux hommes

1.     Des sociétés encadrées

a.       Censure et « bourrage de crâne » -Histoire de mots p.285

Documents p.295. La mobilisation des sociétés : patriotisme et propagande- La guerre s’installant dans la durée, le maintien du moral des troupes et de l’arrière est un enjeu de première importance et la propagande occupe une place centrale dans les sociétés belligérantes. D’où le contrôle exercé sur le courrier entre le front et l’arrière, sur la production culturelle (chanson, théâtre…) et surtout sur l’information. La France est en guerre le 3 août 1914, mais dès le 2 août, l’activation de la loi sur l’état de siège suspend la liberté de la presse. Le 5 août, un organe de censure -Vocabulaire p.284 est créé. Il s’agit d’interdire :

  • la publication d’informations sensibles ;
  • toute nouvelle pouvant agir négativement sur le moral de la population (« défaitisme »).

À cet effet, un bureau de presse national et des bureaux départementaux qui emploient jusqu’à 5 000 fonctionnaires exercent une censure avant parution. Les articles censurés sont laissés en blanc, faute de temps pour refaire la mise en page du journal après le passage d’Anastasie. Photos et film subissent le même sort : un service de photographie et de cinématographie des armées créé en 1915 a l’exclusivité des images venant du front.

Avant même la création d’un bureau de propagande -Vocabulaire p.284 en 1916, des campagnes de presse officielles sont lancées pour orienter l’information. Il s’agit soit de désinformation destinée à exagérer les succès ou minorer les revers français, soit de propagande visant à convaincre et à mobiliser la population.

Journaux, affiches, actualités cinématographiques, manuels scolaires, bandes dessinées etc., développent des thèmes récurrents : le patriotisme, la Revanche, l’Union sacrée, l’anti-germanisme mais aussi le combat pour la civilisation contre la barbarie, la guerre du droit, la « der des ders » [27].

b.      Un contrôle politique accru

Dans l’atmosphère à la fois angoissée et exaltée du début de guerre, les États décrètent l’Union sacrée (Burgfrieden « trêve civile » pour l’Allemagne) : les débats politiques reportés à l’après-guerre. Il faut afficher l’unité, et taire (et faire taire) les divisions. Dans ces conditions, la vie démocratique est mise entre parenthèses et l’exercice du vote, dans les pays où il existe, est reporté.

2.     Des sociétés transformées

a.       La culture de guerre

La propagande tente de construire et de consolider le consensus national. Les causes du combat sont quotidiennement rappelées aux civils, les chefs héroïsés. L’ennemi est stigmatisé, déshumanisé pour être mieux combattu ; de fausses légendes circulent sur son compte. La mobilisation culturelle passe par différents supports : affiches, cartes postales, livres, cinéma d’actualité, mais également par les objets du quotidien comme la vaisselle ou les jouets d’enfants. Cette culture de guerre -Vocabulaire p.284 soutient l’investissement des civils et des militaires dans l’effort de guerre.

b.      Des tensions internes

En même temps que l’union sacrée était recherchée, la guerre et les discours de guerre exacerbaient également tensions et rancœurs :

  • Par exemple, les soldats dénoncent les « embusqués », qui échappent aux combats, et qui sont souvent caricaturés en bourgeois efféminés, par opposition aux « Poilus ».
  • De même, en dépit des discours unificateurs, des fractures se font jour, par exemple au moment de l’échec des grandes offensives d’août 1914, quand les soldats du Midi sont stigmatisés pour leur prétendue indolence, voire lâcheté[28]

c.       Une « brutalisation » des sociétés ?

La Première Guerre mondiale demeure un champ très actif de la recherche historique, suscitant des analyses aussi stimulantes que discutées. C’est le cas des théories de l’historien américain George L. Mosse[29], qui estime que ce conflit constitue une rupture dans la perception de la guerre : en banalisant la destruction de masse, elle modifie le rapport des hommes à la mort. Les sociétés s’accoutumeraient ainsi aux violences physiques et psychologiques de la guerre : elles seraient « brutalisées ». Pour lui, « la banalisation et l’intériorisation de la violence de guerre permettent d’accepter durablement tous ses aspects, même les plus paroxysmiques et de les réinvestir dans le champ politique de l’après-guerre ». Cette notion de brutalisation permettrait de comprendre le maintien de formes de violence dans l’après-guerre, notamment en Allemagne (putsch, assassinats, combats de rue, etc.), voire l’arrivée au pouvoir des nazis[30].

C.    Les crises de l’année 1917

1.     Les raisons des crises et leurs manifestations

L’année 1917 est celle de la lassitude des peuples devant un conflit qui paraît interminable. Cette lassitude atteint les soldats qui supportent depuis 3 ans des souffrances et des dangers pour une issue que nul n'aperçoit puisque les opérations militaires sont dans l'impasse. Elle se marque à l'arrière par l'exaspération des populations atteintes par les mesures de rationnement alimentaire (Cf. « l'hiver des navets ») et énergétique (le charbon est réservé aux industries de guerre). Il en résulte un très vif mécontentement. L'impasse militaire et la détérioration des conditions sociales accroissent l'audience du faible courant d'opposition à la guerre, essentiellement constitué par des minorités socialistes[31].

Tous les pays en guerre connaissent des crises brutales. La plus grave touche la Russie où elle emporte le régime tsariste. L’Europe occidentale est également atteinte par des mouvements d'indiscipline militaire. En France, en mai 1917, se produisent des refus d'obéissance, des désertions, des mutineries et même un projet de marche sur Paris de deux régiments de Soissons, par lassitude des offensives meurtrières. Les mouvements d'agitation qui ont atteint la flotte allemande durant l'été 1917 ont pour cause la médiocrité du ravitaillement et les brimades dont les matelots sont l'objet. Enfin, en Italie, à l'automne 1917, le désastre militaire de Caporetto qui voit l'effondrement du front italien devant les Autrichiens est suivi d'une vague de désertions.

En plus des mouvements d'indiscipline, des troubles sociaux se produisent, sous la forme de grèves et de manifestations -PDP#30 p.292-293. Les grèves de 1917 + Sujet bac p.300-301. L’Allemagne, dont la population est exsangue, et l’Italie sont déstabilisées par la vague de grèves qui éclate au printemps 1917, installant un climat révolutionnaire : au mois d’août à Turin, le mouvement de grève tourne à l’insurrection armée. L’émeute est réprimée dans le sang (on compte près de cinquante morts).

Ces mouvements sociaux prennent vite un tour politique avec la revendication de la paix. En effet, la crise culmine avec une puissante poussée pacifiste qui rompt le consensus d’union sacrée établi en 1914. À la demande formulée par le Président Wilson en décembre 1916 d'ouverture de négociations répondent diverses initiatives : le nouvel empereur d'Autriche-Hongrie Charles Ier, successeur de François-Joseph, tente de sonder les Alliés sur les conditions de paix ; le chancelier allemand Bethmann-Hollweg fait étudier par les militaires les clauses éventuelles d'un traité ; en juillet 1917, la majorité du Reichstag vote une motion réclamant une paix sans annexion ni indemnité. En août, le pape Benoît XV lance un appel au compromis. Cette offensive renforce les courants pacifistes : en Angleterre, l'homme d'État conservateur Lord Lansdowne conseille la négociation ; en France, le radical Joseph Caillaux devient le chef de file des partisans de la paix immédiate, cependant que les minoritaires socialistes contraignent leur parti à rompre l'Union sacrée en 1917 et à quitter le gouvernement.

2.     La solution : des gouvernements forts

Partout, les crises sont résolues par des gouvernements forts qui, pour gagner la guerre, mettent de côté les libertés et les principes démocratiques. En Allemagne, la réalité du pouvoir passe aux chefs de l'armée, Hindenburg -Biographie p.255 et Ludendorff : c'est la « dictature de l'état-major ». Celui-ci mate par des exécutions l'agitation de la flotte, met fin aux grèves en plaçant les usines sous son autorité, fait renvoyer le chancelier Bethmann-Hollweg coupable d'avoir laissé voter la motion de paix du Reichstag et obtient la nomination à sa place de personnages dépourvus d'autorité et qu'il contrôle étroitement.

Dans les pays de l'Entente arrivent au pouvoir des hommes énergiques, qui font bon marché des principes au nom desquels combattent les démocraties libérales, Lloyd George en Grande-Bretagne, Orlando en Italie, Clemenceau en France. En s’appuyant sur l’extraordinaire popularité dont il jouit dans l'opinion, celui-ci devient le seul maître de la conduite de la guerre, refusant d'informer le Parlement (sous prétexte de sauvegarder les secrets militaires), négligeant le Conseil des ministres (constitué d'amis personnels ou de personnalités falotes), ne tenant guère au courant le président de la République. La politique qu'il mène est celle de la guerre à outrance jusqu'à la victoire -Citation p.285. Il manifeste sa détermination en épurant l'administration et la police de tous ceux qu'il accuse de mollesse, en faisant exécuter les traîtres compromis dans des affaires de trahison, mais aussi en discréditant les pacifistes, assimilés à des traîtres. Il restaure ainsi le délit d'opinion, et fait emprisonner Joseph Caillaux et l'ancien ministre de l'Intérieur Malvy, qu'il accuse de complaisance envers les pacifistes. Enfin, nommé au printemps 1917 généralissime, le nouveau commandant en chef, le général Pétain, met fin à l'agitation de l'armée par l’amélioration des conditions de vie des soldats, par le renoncement aux offensives inutiles et meurtrières, mais aussi par la répression (exécutions, emprisonnements).

Ce sont ces gouvernements forts qui vont mettre fin au conflit… et conduire la diplomatie d’après-guerre.

Conclusion

Révisions p.298-299

Sujets bac p.300-303


[1] La notion de guerre totale qualifie un conflit armé qui mobilise toutes les ressources disponibles de l'État pour mobiliser et détruire la totalité des ressources du belligérant adverse, en procédant à des destructions civiles autant que militaires. Elle impose une gestion étatisée et centralisée, et le contrôle de l'arrière et des opinions publiques au moyen en particulier de la propagande, pour s'assurer du soutien de toute la société. Source : Wikipédia.

[2]En 1918, les industries d'armement et d'aéronautique françaises occupent 1,5 million de personnes et produisent quotidiennement 261 000 obus et 6 millions de cartouches.

[3] Notamment auprès des États-Unis pour les Alliés.

[4] En novembre 1915, la France lance, à grand renfort de propagande, son premier emprunt national -Vocabulaire p.283.

[5] En France, la part de la main-d’œuvre féminine dans la population active salariée passe de 38,2% en 1911 à 46% en 1918 et atteint 40 à 50% dans les régions les plus industrialisées ; sa part dans la métallurgie passe de 7 à 20%.

[6] Cf. naufrage du Lusitania en mai 1915.

[7] Cf. création du Board of Invention and Research par le Royaume-Uni.

[8] Max Planck effectue des travaux en thermodynamique, en électromagnétisme et en physique statistique. Il est l’auteur de la « constante de Planck », et de la théorie des quanta (les photons).

[9] Einstein est l’auteur de la théorie de « la relativité restreinte » (l’équation qu’il rédige alors, « = mc² » (énergie = masse x célérité [vitesse de la lumière] au carré), établit une équivalence entre la matière et l’énergie (toute matière est énergie). En 1916, il publie sa théorie de « la relativité générale », qui fonde avec ses ouvrages de 1905 et 1916 la base de la physique moderne.

[10] Ainsi, sur la Somme, lors du bombardement allié de sept jours qui précède l’offensive, 1 500 000 obus sont tirés par les 50 000 artilleurs britanniques. En 1918, les offensives alliées sur les fonts ouest et italien furent régulièrement appuyées par 5 000 à 8 000 pièces d’artillerie.

[11] La Grosse Bertha est le surnom donné à une pièce d’artillerie particulièrement puissante fabriquée par Krupp pour l’armée allemande afin de détruire les fortifications (le nom industriel de ce canon est « M42 », et son surnom vient du prénom de la fille de Friedrich Alfred Krupp). Elle utilise des obus de 800 kg, chargés d’explosifs, qui peuvent percer des murs de 3 mètres d’épaisseur avec une portée de 14 km. Le Canon de Paris, qui est souvent confondu avec la Grosse Bertha, bombarde Paris en 1918. Ce canon pèse 700 tonnes et sa portée maximum est de 130 km.

[12] Le lance-flamme est également très dangereux pour le soldat qui l’utilise, et bien que dévastateur et terrifiant, il sera finalement peu utilisé.

[13] Le premier combat aérien de l’histoire a lieu en octobre 1914, quand un avion allemand est abattu par deux aviateurs français.

[14] Les aviateurs tels que le Français Georges Guynemer ou l’Allemand Manfred Von Richthofen, dit le « Baron Rouge » jouissent d’un immense prestige.

[15] Sa première division aéronautique, composée de plusieurs centaines de chasseurs et bombardiers, intervient dans la deuxième bataille de la Marne avec une redoutable efficacité.

[16] Les Alliés prennent très clairement l’avantage dans ce domaine : les Allemands, de leur côté, préfèrent les dirigeables Zeppelin pour le bombardement de Paris ou de Londres.

[17] Cf. le HMS Dreadnought, qui synthétise tous les progrès de l’époque et révolutionne la construction des cuirassés, marquant un vrai tournant dans cette technologie.

[18] Le gaz moutarde, qui est quasiment devenu à lui seul le symbole de cette guerre chimique, a des propriétés extrêmement nocives en cas de trop long contact : il provoque des cloques, des hémorragies internes, il endommage fortement les voies respiratoires, les yeux et détruit les tissus pulmonaires. Les victimes de ce gaz souffrent beaucoup, avant d’y succomber, en moyenne au bout de cinq semaines.

[19] Ainsi, Georges Painvin, paléontologue et héros de la cryptologie, recruté par le service du Chiffre français, réussit à décoder un message allemand chiffré annonçant la préparation d’une attaque prévue le 9 juin 1918 sur Compiègne, et permet une contre-offensive efficace des Français.

[20] Les soldats français reçoivent entre 3,5 et 4 millions de lettres par jour.

[21] Stratégie de terreur, les bombardements frappent aussi des symboles tels que la cathédrale de Reims. Pour en savoir plus.

[22] La Première Guerre mondiale constitue cependant un véritable laboratoire où s'élaborent les pratiques systématisées trente ans plus tard.

[23] Dans le Nord de la France et en Belgique, les routes sont rendues impraticables, les maisons inhabitables, les puits souillés, mais les villages aussi sont systématiquement incendiés, les établissements artisanaux et industriels anéantis, les instruments agricoles détruits ; même les arbres fruitiers des jardins n'échappent pas à la destruction systématique.

[24] L'entre-deux-guerres voit l'élaboration de théories du bombardement stratégique, qui instaurent la destruction des villes comme enjeu décisif. Afin d'atteindre leur objectif, les attaques doivent viser non seulement les infrastructures économiques et administratives qui font des villes les centres névralgiques de la conduite de la guerre, mais aussi les civils. L'atteinte aux non-combattants, la destruction des lieux et infrastructures ordinaires de la vie sociale (logements, réseaux, centres administratifs, etc.) visent à provoquer une rupture du consensus patriotique soutenant l'effort de guerre.

[25] Turcs, Turcomans, Kurdes, Tatares, Lazes, Persans, Arabes et de populations juives ou chrétiennes -Grecs, Syriens, Assyro-Chaldéens.

[26] Jean Jaurès dénonce alors une « guerre d'extermination » à la tribune de la Chambre des députés.

[27] La « der des ders » : la dernière guerre qu’il faut gagner pour qu’il n’y ait plus de guerre.

[28] Cf. la fameuse « Affaire du XVe corps »

[29] George L. MOSSE, La Brutalisation des sociétés européennes. De la Grande Guerre au totalitarisme, 2000

[30] Pour George L. Mosse, c’est parce que la société allemande a été rendue brutale par la guerre qu’elle a accepté le nazisme. Cette brutalisation marque la génération exposée au conflit en façonnant un imaginaire mêlant héroïsme, camaraderie et haine de l’adversaire, et elle se transmet au champ politique, pour faire de la politique un monde scindé entre amis et ennemis mortels.

[31] Cf. « Une société à l’épreuve de la guerre », sur le site du Centenaire de la Première Guerre mondiale.

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