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Sommaire

I. LES CAUSES DE LA CRISE
A. UN PHÉNOMÈNE COMPLEXE, ANALYSÉ DE DIVERSES MANIÈRES
B. UN MÉCANISME IMPLACABLE
1. Prospérité économique et innovations financières
2. Ralentissement économique et retournement financier

II. DE LA CRISE AMÉRICAINE À LA CRISE MONDIALE
A. UNE CRISE AMÉRICAINE...
1. La crise financière
2. De la crise financière à la crise économique
B. …QUI S’ÉTEND À L’ÉCHELLE MONDIALE
1. Les mécanismes de propagation de la crise
2. Tout le monde est touché (sauf l'Union soviétique), mais de façon différente
3. Un cloisonnement dangereux de l’économie mondiale

III. DE LOURDES CONSÉQUENCES SOCIALES, DES RÉACTIONS DIVERSES
A. LA SOCIÉTÉ AMÉRICAINE EN CRISE
1. Irruption du chômage de masse
2. Une société profondément affectée
B. LUTTER CONTRE LA CRISE
1. Attentisme et déflation
2. La recherche de nouvelles politiques de relance

Manuel p.28-53

Introduction

Introduction + problématique et image inaugurale p.28-29- Ce chapitre vise à montrer l’impact de la crise économique mondiale sur les sociétés et les équilibres politiques, à court, moyen et long terme.

Avec le krach boursier -Vocabulaire p.32 du 24 octobre 1929 à Wall Street, la crise américaine se diffuse au reste du monde, entraînant une longue dépression -Vocabulaire p.32 économique dont la plupart des pays ne sont pas pleinement remis à la veille de la Seconde Guerre mondiale[1].

En quoi la crise des années 1930 ébranle-t-elle le capitalisme libéral ?

I. Les causes de la crise

A.    Un phénomène complexe, analysé de diverses manières

Les économistes proposent des interprétations différentes selon leurs écoles de pensée[2] -dossier p.35. Une crise de la pensée économique.

B. Un mécanisme implacable

1.     Prospérité économique et innovations financières

Manuel p.31. Les mécanismes de la crise- La flambée de la Bourse repose au départ sur des bases solides, puisque la guerre vient d'assurer à l'économie étatsunienne une domination mondiale incontestée. En effet, la hausse des cours de la bourse de New York correspond initialement à une hausse des profits des entreprises[3]. Des innovations financières soutiennent cet essor :

  • Du côté de la demande, le développement du crédit à la consommation accélère l'équipement des ménages et dopent la demande -doc.2 p.34. Une frénésie de consommation.
  • En matière de placements, des « fonds d'investissement » (investment trusts) sont créés pour gérer des portefeuilles d'actions.

Cependant, entre 1921 et 1929, alors que la production industrielle augmente d’environ 50%, le cours des actions est multiplié par quatre (300%). Stimulée par la croyance dans une prospérité sans fin,

la bulle spéculative -Vocabulaire p.32 est favorisée par les mécanismes d'achat à la marge[4], et alimentée par les particuliers et les entreprises[5]. Mais la spéculation -Vocabulaire p.33 à la hausse ne pouvait pas durer indéfiniment, l'économie financière décrochant de plus en plus de l'économie réelle[6].

2.     Ralentissement économique et retournement financier

Or, la situation économique commence à se dégrader aux États-Unis en 1929 et dans le monde[7] : la prospérité sur laquelle se fondait l’envol boursier est devenue factice -doc.1 p.34. Des signes avant-coureurs. Dans ce contexte, un retournement du marché est logique et la puissance des mécanismes spéculatifs qui ont entraîné la forte hausse explique l'importance de la chute.

II. De la crise américaine à la crise mondiale

A.    Une crise américaine

1.     La crise financière

Le jeudi 24 octobre, les ordres de vente déferlent : en quelques heures, 12 894 650 titres sont jetés sur le marché et certains d’entre eux ne trouvent preneur à aucun prix[8]. La foule des spéculateurs s’agglutine dans les bureaux des courtiers, où le télétype permet de suivre l’évolution des cours à distance.

Une riposte s’organise : vers midi, une réunion improvisée dans les locaux de la banque JP Morgan (face à la Bourse), rassemble une demi-douzaine de grands banquiers, qui décident d'engager des fonds pour contrer la baisse. Les cours se redressent jeudi après-midi[9] et vendredi.

 Durant le week-end, les courtiers font courir des rumeurs rassurantes pour la reprise du lundi. En fait, la chute se poursuit les jours suivants. Cette baisse va se poursuivre jusqu'en 1932, jusqu’à atteindre un niveau inférieur à celui de 1921. Mais ces moyennes abstraites expriment mal la détresse individuelle des spéculateurs de tout rang qui ont tout perdu[10].

2.     De la crise financière à la crise économique

Au plus haut niveau, on prétend que le krach n'aura pas d'incidence sur la prospérité économique, la situation étant fondamentalement saine.

Mais la crise boursière a joué un rôle de détonateur : elle a détruit le système complexe de crédit qui s'était greffé sur Wall Street et dont dépendait en grande partie l'équilibre de l'économie américaine. Tout converge vers une raréfaction de l'argent disponible, et donc vers un phénomène de déflation -Vocabulaire p.32.

En effet, le « jeudi noir » se produit dans un contexte économique déjà marqué par une inquiétante surproduction par rapport à la demande ;

  • La surproduction agricole provoque l'effondrement des cours des denrées alimentaires, acculant souvent à la ruine une paysannerie qui regroupe encore à ce moment 20% des actifs.
  • La production industrielle, comme l'automobile, diminue[11]. Les entreprises, devant la raréfaction des débouchés, cherchent à vendre à tout prix leurs produits -d’où une baisse des prix. Dans le même temps elles diminuent aussi leur production, arrêtent brutalement les investissements et licencient massivement. La baisse de la masse salariale se traduit par une nouvelle baisse de la demande qui entraîne une nouvelle baisse des prix et de la production, et ainsi de suite.

B.    …qui s’étend à l’échelle mondiale

1.     Les mécanismes de propagation de la crise

À l'exception de l'Union soviétique, le monde entier est gagné en deux ans par la crise, à des degrés divers.

a.       Le rôle du commerce

Entre 1929 et 1932, le commerce mondial diminue du quart en volume et de près des deux tiers en valeur du fait de la baisse des prix. Cet effondrement est accentué par le recours généralisé au protectionnisme -Vocabulaire p.33.

Pour comprendre ce processus, il faut également tenir compte des structures du commerce mondial des années 1920, dictées par une division internationale du travail héritée du XIXe siècle et de la colonisation : les pays développés exportent des produits manufacturés vers les empires coloniaux et les pays « périphériques », d'où ils importent des produits primaires. Si les pays développés entrent en récession, ils entraînent les pays « périphériques » dans la crise.

b.      Le rôle des mouvements de capitaux et la crise financière internationale

Les prêteurs américains interrompent leurs investissements et rapatrient leurs placements à l’étranger, entraînant un effondrement du crédit international qui soutenait en grande partie l'économie mondiale.

La situation se dégrade pour les banques allemandes, dépendantes de ces capitaux. On assiste à l’été 1931 à une ruée des déposants dans les banques, et à une faillite du système bancaire allemand, repris par l'État. D'Allemagne, la crise financière se répercute en Grande-Bretagne, contrainte d’abandonner l'étalon-or et de dévaluer -dévaluation, vocabulaire p.42 la livre sterling.

2.     Le reste du monde est touché (sauf l'Union soviétique[12]), mais de façon différente

Comme aux États-Unis, la crise nourrit la crise. On assiste partout à une dépression jusqu'en 1932, suivie d'une reprise inégale selon les pays.

  • C'est en Allemagne que la crise est la plus précoce et la dépression la plus forte. Le nombre de chômeurs atteint 5,5 millions en 1932 (plus 8 millions de chômeurs partiels -Vocabulaire p.36)[13].
  • La Grande-Bretagne, au contraire, connaît une dépression moins grave que les États-Unis ou l'Allemagne, amortie par la dévaluation de 1931 et le repli sur l'Empire.
  • Quant à la France, elle apparaît comme un pays moins touché où la crise est plus tardive, mais aussi plus durable[14].
  • Les pays « périphériques » sont affectés par un blocage des processus de développement amorcés depuis le début du siècle et plus encore après la Première Guerre mondiale : c’est le cas des pays d'Amérique latine, dont les économies souffrent de la contraction du marché des États-Unis et de la baisse des prix[15] -PDP#1 p.40-41. Les conséquences de la crise de 1929 en Amérique latine.

3.     Un cloisonnement dangereux de l’économie mondiale

Lors de la conférence économique mondiale, qui rassemble à Londres en juin-juillet 1933 les représentants de 66 États, il s’avère impossible d'enrayer la montée du protectionnisme et la dissolution du Gold Exchange Standard -Vocabulaire p.32. Cet échec démontre la force des égoïsmes nationaux.

Deux groupes de pays émergent :

  • les États-Unis, le Royaume-Uni, la France détiennent de l’or (ensemble, 80% du stock mondial) et contrôlent des marchés privilégiés, ce qui leur permet d’amortir les effets de la dépression.
  • L’Allemagne, le Japon et l’Italie, endettés, dépourvus d'or et sans grands Empires, se trouvent réduits à leurs propres ressources. La solution de l’autarcie -Vocabulaire p.42 ne résout pas la crise, et elle prépare la guerre de conquête : à partir de 1937, la course aux armements s'impose comme un moyen efficace de résorber cette nouvelle crise mondiale, au péril de l'humanité[16].

III. De lourdes conséquences sociales, des réactions diverses

A.    La société américaine en crise

1.     Irruption du chômage de masse

Dossier p.38-39. Le chômage de masse- Il n'y a pas à l’époque de recensement officiel du chômage, mais toutes les estimations révèlent une explosion du nombre de chômeurs : de 1,5 million en 1929 (3% de la population active), on passe à 12 millions en 1932 (25% de la population active). Le chômage n’étant alors pas indemnisé, la misère se répand[17], secourue par les seules institutions caritatives -Cf. bread lines).

2.     Une société profondément affectée

Les agriculteurs sont parmi les plus durement touchés : ruinés par l'effondrement des cours agricoles, ils sont contraints de céder leur terre à vil prix pour faire face à leurs dettes. Certains reprennent une nostalgique migration vers l'Ouest en quête de l'illusoire paradis californien[18]. L’appauvrissement gagne aussi les employés, les professions libérales, les capitalistes ruinés. Même la nuptialité et la natalité régressent, tant l'avenir paraît sombre. Des bidonvilles, nommés par dérision « hoovervilles » -Le sens des mots p.36, apparaissent autour des grandes villes américaines.

L'approfondissement de la misère suscite une angoisse et un désespoir qui se traduisent par la montée d'une agitation sociale sporadique, inorganisée (marches des chômeurs -doc.1 p.38. Un phénomène choquant, marches de la faim…) et parfois violente[19].

B.    Lutter contre la crise

Devant l’ampleur de la récession, les politiques libérales -Le sens des mots p.37 rencontrent leurs limites.

1.     Attentisme et déflation

La crise économique en chiffres p.37- Les dirigeants politiques et les responsables des institutions financières, fidèles à l'orthodoxie libérale, ont laissé s'approfondir la dépression. Pour comprendre leur réaction, il faut se replacer dans le contexte de l'époque : pour les économistes libéraux, les crises sont des « purges » qui doivent permettre au capitalisme de repartir, et une intervention de l'État n'est pas nécessaire -et même indésirable.

a.       La présidence Hoover : des politiques ambiguës

Hoover est passé à la postérité comme le président qui a eu une attitude attentiste, incarnant le slogan « la prospérité est au coin de la rue » (1930). La réalité est plus complexe : c’est un libéral, mais il tente quelques mesures de relance : réduction d'impôts, crédits pour les travaux publics... Cependant, il reste convaincu que l'État ne doit pas se substituer à l'initiative privée, mais seulement l'encourager[20].

Au total, les dépenses fédérales augmentent, et comme dans le même temps les recettes fiscales s'effondrent, on obtient le plus grand déficit jamais réalisé en temps de paix… sans pour autant parvenir à relancer l'activité économique.

b.      La déflation allemande

L'Allemagne du chancelier Brüning (mars 1930 - mai 1932) donne sans doute le meilleur exemple d'une politique déflationniste systématique ; il veut absolument éviter une dévaluation du mark[21].

Pour rééquilibrer sa balance commerciale, il augmente les droits de douane. Pour retrouver l’équilibre budgétaire, en 1930 il réduit les dépenses publiques[22]. Cette politique permet de maintenir une balance commerciale excédentaire, mais en comprimant la demande, elle entretient la spirale déflationniste.

a.       La Grande-Bretagne : une politique déjà ancienne

Avec la crise financière de 1931, le gouvernement accentue une politique déflationniste préexistante. Guidé par les experts du May Comittee, qui affirment qu'il faut à tout prix rétablir l'équilibre, notamment en diminuant l'allocation de chômage[23] -doc.2 p.38. La misère sociale en Angleterre.

b.      La France : une déflation prolongée

La France, refusant toute dévaluation du franc, s’obstine dans une politique déflationniste qui prolonge la crise jusqu’en 1936[24].

2.     La recherche de nouvelles politiques de relance

Mais la persistance de la crise a montré l'inefficacité des politiques déflationnistes. Une intervention de l'État pour relancer l’économie apparaît nécessaire. Cette intervention est souvent interprétée a posteriori comme l'amorce d’une politique keynésienne. Cependant, si à l'époque Keynes défend déjà les idées de relance par des dépenses publiques, la théorie keynésienne n'est pas encore formulée (la Théorie générale date de 1936) et ces politiques sont plus une réponse empirique à une situation que la mise en pratique d’une analyse théorique.

Ces politiques « prékeynésiennes » s’accompagnent souvent de la recherche de nouvelles formes de régulation sociale qui préfigurent le développement de l'État-providence et des négociations collectives après la Seconde Guerre mondiale -Vocabulaire p.42.

a.       Le New Deal : ébauche de nouvelles régulations

PDP#2 p.44-45. 1933. Un nouveau président, F.D. Roosevelt, pour une nouvelle politique, le New Deal- Tirant les conséquences de l’échec du président républicain Hoover, les Américains élisent largement (57% des voix) le démocrate Franklin D. Roosevelt en 1932 -Biographie p.342. Celui-ci n'a pas de programme clair, et la plate-forme démocrate est plutôt déflationniste. Mais les expérimentations qu’il conduit sous l'influence du Brain Trust[25] donnent lieu à deux New Deal.

Le premier New Deal

Il repose sur les mesures prises au printemps 1933. En cent jours, quinze lois sont votées qui réorganisent le secteur bancaire, agricole et industriel :

  • Dans le secteur bancaire, des mesures de contrôle du système bancaire sont prises, en particulier la stricte séparation entre les activités de banques de dépôts et de banques d'affaires[26].
  • Dans le domaine agricole, le vote de l'Agricultural Adjustement Act a pour but de restreindre la production agricole pour stopper la chute des cours : les agriculteurs qui baissaient leur production recevaient en contrepartie des aides de l'État.
  • Dans le domaine industriel, le vote du NIRA (National Industrial Recovery Act) a pour but de favoriser la relance en encadrant la concurrence. Ce texte prévoit que les différentes industries établiraient des codes de concurrence loyale dans lesquels elles pourraient fixer des prix minimum et des quantités de production, les ouvriers bénéficiant de négociations collectives, de salaires minimum, d’un temps de travail réglementé et de l’interdiction du travail des enfants. L'adhésion à ces codes n'était pas obligatoire, mais incitative : ceux qui y adhéraient bénéficiaient du label « we do our part». Au total, 96% des industries ont signé, malgré des exceptions notables (Ford).

Face au chômage de masse, des mesures d'aide aux chômeurs sont prises, et on assiste au lancement de la politique de grands travaux avec la Civil Work Administration (CWA)[27] et de l'aménagement de la vallée du Tennessee (Tennessee Valley Authority). Dans le domaine monétaire, Roosevelt au départ est plutôt pour la déflation et une monnaie stable. Mais les circonstances le poussent à une politique plus inflationniste et à une dévaluation de plus de 40% du dollar (1934).

Ce premier New Deal se traduit par une reprise limitée, et par un chômage qui reste élevé. D’où les critiques des milieux libéraux, qui reprochent par exemple au NIRA de favoriser le syndicalisme et obtiennent son annulation par la Cour suprême (2 mars 1935).

Le second New Deal

Le second New Deal qui se met en place à partir du printemps 1935 se traduit par le développement des grands travaux et l'utilisation systématique du déficit budgétaire, l'ébauche de l'État-providence, mais aussi la confirmation du rôle reconnu aux syndicats et à la négociation collective :

  • Les grands travaux sont encadrés par la Work Public Administration qui succède à la CWA et qui, à la différence de cette dernière, accorde des salaires proches des salaires moyens. Cette politique est financée par le recours au déficit du budget.
  • Dans le domaine social, le droit à la négociation collective est confirmé par le National Labor Relation Act (5 juillet 1935) qui reprend les dispositions du NIRA et qui est complété par le Fair Labor Standard Act (juin 1938) instaurant un salaire minimum.
  • De plus, le Social Security Act du 15 août 1935 crée un système de sécurité sociale aux États-Unis, encore embryonnaire -il ne couvre que la vieillesse et le chômage et exclut certaines catégories (domestiques, salariés agricoles).

Le bilan du New Deal en 1939 apparaît mitigé : certes la reprise est indéniable (le revenu national a plus que doublé et de nombreux travaux ont amélioré l'infrastructure du pays), mais le PIB est à peine supérieur au niveau de 1929, et le chômage reste élevé. Cependant, par-delà ces résultats immédiats, le New Deal semble poser les bases d'une nouvelle forme d'organisation de l'économie capitaliste, forme d'organisation dans laquelle l'État intervient (en particulier avec l'utilisation systématique des politiques keynésiennes), dans laquelle un minimum de protection sociale est assuré aux citoyens et où les partenaires sociaux négocient collectivement les contrats de travail et les salaires. Ces nouvelles bases permettront à une société de consommation de masse de s'épanouir aux États-Unis et dans le monde capitaliste après la Seconde Guerre mondiale.

b.      La France et le Front populaire

La victoire du Front populaire en 1936 traduit, en même temps que le rejet d’une extrême droite antiparlementaire -Vocabulaire p.36 et fascisante, le fait qu'une partie grandissante de l'opinion souhaite la mise en œuvre de nouvelles politiques économiques[28].

Le programme du Front populaire, appliqué par le gouvernement de Léon Blum -Biographie p.342 à partir de juin 1936, était fondé sur l'idée qu'il fallait remplacer la déflation par la « reflation », c'est-à-dire relancer l'activité économique par une hausse du pouvoir d'achat, en particulier grâce aux 40 heures qui en s’accompagnant d'un maintien du salaire devaient entraîner des embauches. Il comportait aussi quelques prudentes réformes de structure, en particulier concernant la Banque de France[29].

Les mouvements de grève de juin 1936 contraignent les autorités à aller plus loin :

  • PDP#3 p.46-47. Juin 1936 : les accords Matignon- par les accords de Matignon qui décident des hausses de salaire de 7 à 15%, ainsi que la reconnaissance par le patronat du fait syndical et du droit à la négociation collective (création des délégués du personnel pour les entreprises de plus de 10 salariés, acceptation du principe de la convention collective).
  • Par l’adoption d'une série de lois sociales : conventions collectives, congés payés (15 jours/an), semaine de 40 heures (au lieu de 48), annulation de la baisse des salaires (10%) que Laval avait imposée aux fonctionnaires, soutien aux prix agricoles. En outre, l’intervention de l’État se solde par des nationalisations -Vocabulaire p.42 (naissance de la SNCGF en 1937), et un programme (timide) de grands travaux est prévu dans le budget de 1937.

Ces mesures ont donné des résultats économiques mitigés (faible reprise économique, faible diminution du chômage, « neutralisation » des accords de Matignon par la hausse des prix entre septembre 1936 et juin 1938…). Toutefois, les réformes sociales initiées seront complétées en 1945 et cette nouvelle donne jouera un rôle clé dans refondation républicaine et la croissance de l'après-guerre.

c.       L'Allemagne : une relance autarcique dans un système totalitaire

Quand Hitler et les nazis arrivent au pouvoir en 1933, la crise est à son paroxysme, et ils n'ont pas de doctrine ni de programme économique. La situation de l'Allemagne est très préoccupante : il n'y a plus ni réserves, ni entrées de capitaux permettant de financer un déficit commercial et, d'autre part, l'Allemagne a des dettes considérables. De plus l'Allemagne se refuse à dévaluer.

La politique de relance reposera sur des grands travaux (autoroutes) financés par l'État en recourant à un déficit budgétaire[30] et, de plus en plus, le réarmement -Économie de guerre : vocabulaire p.42[31]. Cette politique, lourde de menaces pour la paix, est un succès économique et social indéniable : le chômage tombe à 1,6 million en 1936 (6 millions en 1930), 900 000 en 1937, 200 000 en 1938. La production de biens d'équipement est à l'indice 256 en 1939 (100 en 1928), celle de biens de consommation à 119.

Conclusion

Synthèse p.48-49

Sujets bac p.50-53


[1] En 1932, au plus profond de la dépression, la production mondiale est de 40% inférieure à celle de 1929, les prix ont chuté de près de 50%, le commerce international s'est effondré et le chômage touche jusqu'à un actif sur quatre.

[2] Cf. https://view.genial.ly/5f1c3ec9a1a5620d688520d1/vertical-infographic-1929-analyses

[3] Les profits industriels augmentent de 156% entre 1923 et 1929.

[4] La pratique des « achats sur marge » permet au spéculateur de ne verser qu'une fraction du prix des actions qu’ils acquièrent auprès des courtiers, qui leur avancent la différence (jusqu’à 90% des sommes nécessaires, souvent empruntées aux banques).

[5] NB. La spéculation provient en partie des particuliers, encouragés à placer leurs économies, et à emprunter aux courtiers ; mais les capitaux apportés par les entreprises sont beaucoup plus importants : en réalité, il faut nuancer l’image souvent exagérée d’un « peuple boursicoteur » : sur 30 millions de familles, un peu moins de 1 million et demi se livrent à des opérations boursières et là-dessus plus de la moitié ne fait aucune opération spéculative.

[6] La hausse des profits ne suit plus la hausse des cours. Ainsi la General Motors voit son cours passer de 18 à 92 dollars, mais malgré une hausse des bénéfices le dividende tombe de 13 à 6%, de même pour General Electric dont le cours passe de 80 à 403 dollars et le dividende de 7 à 2%.

[7] Ainsi aux États-Unis, la production d'automobiles, après avoir atteint un maximum en mars (622 000), était retombée à 416 000 en septembre. Le bâtiment, déjà en difficulté, est le secteur le plus atteint.

[8] L'historien du krach, John K. Galbraith, a décrit ces scènes inouïes, comme la Bourse déjà centenaire de New York n'en avait jamais connu : « Vers 11 heures, le marché avait dégénéré en une mêlée folle et effrénée pour vendre. Vers 11h30, il s'abandonnait à une terreur aveugle et sans merci. C'était vraiment la panique... ».

[9] L'action d'US Steel, premier support de la contre-offensive des banquiers, termine même en progression sur la veille !

[10] Les suicides retentissants, comme celui de deux spéculateurs « à la marge », titulaires d'un compte joint, qui sautent ensemble du haut du Ritz, donnent naissance en Europe à une sorte de légende noire.

[11] Entre 1929 et 1932, la production industrielle américaine diminue de près 50% avec une chute remarquable dans le secteur des biens durables (près de 70%) -auparavant achetés à crédit.

[12] Au contraire, à l’heure où Staline accélère la collectivisation et lance le Ier plan quinquennal, l’Union soviétique affiche des statistiques triomphales et lit dans la crise la confirmation de la supériorité du socialisme sur le capitalisme.

[13] 4 ouvriers sur 5 sont sans travail dans le bâtiment, 3 sur 5 dans l'industrie du bois, 2 sur 5 dans l'industrie mécanique.

[14] Si la France échappe à la crise financière de 1931 en restant cramponnée à l'or, elle est obligée en 1935 d’abandonner l'étalon-or et à dévaluer dans des conditions probablement moins favorables que ses concurrents.

[15] Au Brésil, l'absence de débouchés oblige à détruire le café -doc.1 p.40. La destruction de stocks de café ou à s'en servir comme combustible dans les locomotives.

[16] Attention néanmoins à nuancer l’affirmation répandue selon laquelle c’est la crise qui aurait conduit les nazis au pouvoir en Allemagne et le monde à la Seconde Guerre mondiale. Le processus au terme duquel Hitler parvient à se faire nommer chancelier est plus complexe : à méditer à l’aide de cet article sur le site du Monde diplomatique.

[17] Pour approfondir, voir le podcast « Hard Times », sur le site de France-Culture.

[18] Cf. le roman de Steinbeck, Les Raisins de la colère, et son adaptation cinématographique. Cf. également les célèbres photographies réalisées pour la section photographique de la FSA par Walker Evans et Dorothea Lange -et d’autres encore.

[19] Cf. à Deaborn, dans la banlieue de Détroit, en 1932, quatre des manifestants venus présenter les revendications des chômeurs au maire meurent sous les balles de la police.

[20] C'est ainsi qu'il a réuni dès novembre 1929 les grands chefs d'entreprises pour essayer d'obtenir d'eux qu'ils ne baissent pas les salaires, ne licencient pas et poursuivent leurs investissements.

[21] Car le souvenir de l'hyperinflation -Vocabulaire p.32 du début des années 1920 est très présent… et très cuisant.

[22] Les salaires des fonctionnaires sont diminués de 10%.

[23] Keynes aurait dit de ce rapport : « c'est le document le plus idiot que j'aie eu la malchance de lire ».

[24] Cf. les décrets de « famine et de misère » du 16 juillet 1935 qui diminuaient de 10% les dépenses publiques.

[25] Cf. Wikipedia.

[26] Glass Steagal Act, aboli en 1999.

[27] En 1934, le CWA emploie 4 millions de personnes.

[28] Cf. Lumni, La grande explication, « Le Front populaire »

[29] Il s’agissait de la soustraire au contrôle des « deux cents familles ». Ce terme polémique forgé par la gauche française dans les années 1930, désigne les deux cents familles les plus riches censées contrôler l'économie nationale ; en effet, les deux cents plus gros actionnaires de la Banque de France détenaient le monopole de vote aux assemblées générales.

[30] d’abord modéré, le déficit va s'accentuer par la suite.

[31] Le Japon propose un autre exemple de pays évitant la récession par la mise en place d’une économie de guerre et en développant un impérialisme agressif avec la création d'une « zone de coprospérité ».

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