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Sommaire

INTRODUCTION
A. DES FRONTIÈRES DE PLUS EN PLUS NOMBREUSES
B. DES FRONTIÈRES PLUS OU MOINS MARQUÉES
C. FRONTIÈRES ET OUVERTURE : AFFIRMATION D’ESPACES TRANSFRONTALIERS

I. TRACER DES FRONTIÈRES, APPROCHE GÉOPOLITIQUE (AXE 1)
A. POUR SE PROTÉGER : LE LIMES RHÉNAN
1. Le limes : contexte et définition
2. Le limes rhénan
B. POUR SE PARTAGER DES TERRITOIRES : LA CONFÉRENCE DE BERLIN (1885) ET LE PARTAGE DE L’AFRIQUE
1. La conférence de Berlin, une conférence pour partager l’Afrique ?
2. Les frontières coloniales, des frontières durables
C. POUR SÉPARER DEUX SYSTÈMES POLITIQUES : LA FRONTIÈRE ENTRE LES DEUX CORÉE
1. Une frontière née au cœur de la Guerre froide
2. La dernière frontière de la guerre froide ?

II. LES FRONTIÈRES EN DÉBAT (AXE 2)
A. RECONNAÎTRE LA FRONTIÈRE : LA FRONTIÈRE GERMANO-POLONAISE DE 1939 À 1990, ENTRE GUERRE ET DIPLOMATIE
1. Le glaive et le crayon : une frontière récente et disputée (1939-1945)
2. Les mémoires meurtries et les frontières en débat après 1945
3. La frontière d’un nouveau monde : la frontière germano-polonaise et le monde post-guerre froide
B. DÉPASSER LES FRONTIÈRES : LE DROIT DE LA MER
1. De l’unité juridique au partage de l’océan
2. Les enjeux de la course à la mer

III. LES FRONTIÈRES INTERNES ET EXTERNES DE L’UNION EUROPÉENNE (OBJET DE TRAVAIL CONCLUSIF)
A. LES ENJEUX DE SCHENGEN ET DU CONTRÔLE AUX FRONTIÈRES
1. Un espace sans frontières internes ?
2. Les frontières européennes de l’Europe depuis 1990
B. LES FRONTIÈRES D’UN ÉTAT ADHÉRENT : L’ESPAGNE
C. LES ESPACES TRANSFRONTALIERS INTRA-EUROPÉENS : PASSER ET DÉPASSER LA FRONTIÈRE AU QUOTIDIEN

 1spe 3Manuel p.190-275

Introduction

Alors que le monde n'a jamais été aussi perméable à la circulation de biens et d'idées, d'images et de sons, de personnes et de cultures, il paraît indispensable d’éclaircir la notion de frontière, dans sa définition juridique et géopolitique, dans ses fonctions originelles et contemporaines, dans ses évolutions et dans son paradoxal retour. « Les frontières géographiques sont entendues comme les frontières des États et l’État est d’abord territorial[1] ». Dyade, frontière : vocabulaire p.192- Si l'on considère ici avant tout les frontières d'États, la frontière vue comme l’enveloppe externe d'un territoire est une ligne continue qui a caractérisé l'apparition des États modernes. Avant le progrès des techniques de localisation géographique et de cartographie, la frontière était, en l'absence de murailles ou autres fortifications, une périphérie incertaine de « marches » -Vocabulaire p.194 plus ou moins vides.

Une frontière ne saurait être « naturelle ». Doc.1 p.194. Les étapes d’élaboration d’une frontière- Elle est conventionnelle, produite par les sociétés humaines qui font d'éléments morphologiques des supports physiques destinés à en conserver le tracé. Limites séparant deux entités territoriales différentes, les frontières peuvent être plus ou moins fermées, plus ou moins perméables. En fonction des relations entre États, ces frontières peuvent remplir des fonctions différenciées, plus ou moins marquées : filtres, barrières ou charnières.

On observe une tension actuelle entre :

  • L’effacement relatif des frontières dans le processus de mondialisation (processus d’interdépendance renforcée de tous les espaces mondiaux par une intensification des échanges),
  • et leur multiplication (fragmentation politique du monde entraînant un nombre croissant d’États sur la planète).

A.    Des frontières de plus en plus nombreuses

Manuel p.192-193- L’observation de planisphères à différentes périodes depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale montre un processus de « frontiérisation »[2] du monde -doc.1 p.192. Nouvelles frontières et nouveaux États dans le monde + Chiffres p.192. Cette fragmentation de l’espace politique mondial s’observe à diverses échelles et s’explique par des facteurs divers :

  • conséquences de la Seconde Guerre mondiale[3],
  • conséquences de la décolonisation,
  • conséquences de la fin de la guerre froide : dislocations d’anciens États du bloc socialiste, éveil de nationalismes anciens, adhésion de certains PECO à l’espace Schengen[4]

Exercice- Que s’est-il passé en Europe, en Asie et en Afrique dans la seconde moitié du XXe siècle pour que les frontières se multiplient ainsi ? Pour répondre à cette question, rédigez trois paragraphes en vous appuyant sur les trois paires de cartes et sur vos recherches personnelles.

B.    Des frontières plus ou moins marquées

Manuel p.194- La mondialisation a contribué à l’évolution des fonctions des frontières (barrières, filtres, charnières…) -doc.3 p.194. Une frontière fermée + doc.4 p.195. Une frontière ouverte.

En effet, les différents types de flux : matériels, immatériels et de personnes se sont accrus et ont favorisé un effacement relatif de certaines frontières . Certaines infrastructures matérialisent le rapprochement entre États comme le pont sur l’Oyapock entre la Guyane française et le Brésil, voire l’effacement d’anciennes frontières politiques par le pont de 55 kilomètres entre Hong Kong et Macao ouvert en 2018.

 Néanmoins, si cet effacement est réel pour les flux matériels (marchandises et matières premières) et immatériels (capitaux et informations), le franchissement des frontières est souvent plus difficile pour certains flux de personnes (migrants) -doc.2 p.194. Vers un retour des frontières + doc.3 p.194. Une frontière fermée + chiffres p.194.

Les tendances générales sont les suivantes :

  • la persistance ou l'aggravation des tensions frontalières. Par exemple, les contestations frontalières au Moyen-Orient et en Afrique, la violation de frontières agréées en Europe (Crimée, mais aussi Kosovo), les risques issus des héritages de 1945-1953 dans la péninsule coréenne, la permanence de vieux contentieux non réglés, etc. ;
  • le « durcissement » des frontières (sous forme de clôtures et murs) au Moyen-Orient, en Asie du Sud, en Amérique du Nord et désormais en Europe (« refrontièrisation ») ;
  • la poursuite de la délimitation (avec le recours à la Cour internationale de justice (CIJ) et aux arbitrages ou à la signature d'accords bilatéraux) ;
  • la prégnance des questions migratoires en Amérique du Nord, en Europe, en Asie du Sud, en Inde... ;
  • la territorialisation des océans. Cf. tentatives de partage de l'océan glacial Arctique, la délimitation et l'extension des zones économiques exclusives (ZEE) riches en hydrocarbures, l'exacerbation des rivalités stratégiques en mer de Chine méridionale et en Asie du Sud-Est ;

C.    Frontières et ouverture : affirmation d’espaces transfrontaliers

Manuel p.195- Enfin, les frontières, si elles sont des lieux de confrontation, peuvent être aussi des interfaces actives -doc.4 p.195. Une frontière ouverte + Synapse : vocabulaire p.194. Elles peuvent alors servir de charnières entre États voisins aux relations apaisées, où les échanges se multiplient. Il s’agit alors d’espaces transfrontaliers -Vocabulaire p.195, caractérisés par des contacts entre des territoires de souveraineté différente, qui présentent par exemple par des différentiels en termes de coûts, d’opportunités économiques ou d’offres. Les différentiels entre les pays sont exploités par les acteurs géographiques, habitants et entreprises -Chiffres p.195.

Ceci renforce des échanges structurés et durables s’effectuant sur de courtes distances de part et d’autre de la frontière, ce qui les distingue des échanges transnationaux. Les liens l’emportent ainsi sur la séparation. Les flux transfrontaliers entraînent alors une intégration fonctionnelle entre les espaces nationaux que la frontière délimitait jusqu’à alors, comme entre la Suisse et la France.

Ce thème a pour objectif de faire comprendre ce que sont les frontières politiques : leurs formes, leurs dynamiques, les enjeux internes et externes qui leur sont associés, leur fonctionnement comme zones à la fois de séparation et de contact, qu’elles sont ouvertes ou fermées, matérialisées ou non.

Les deux axes visent à :

  • expliciter pourquoi les acteurs tracent des frontières et quelles conséquences ont leurs actions ;
  • montrer les affrontements, débats et négociations liés aux frontières.

I. Tracer des frontières, approche géopolitique (Axe 1)

Toute frontière est la traduction d’un choix politique et son tracé relève des enjeux sous-tendant cette décision. Afin de prendre du recul et d’avoir une distance critique vis-à-vis des débats contemporains sur les frontières, il convient de commencer leur étude en portant un regard historique sur les différentes fonctions que les États assignent aux frontières lorsqu’ils les établissent.

Quels sont les finalités et les usages des frontières politiques ?

A.    Pour se protéger : Le limes rhénan

Le cas du limes -Vocabulaire p.198 rhénan souligne certaines formes et fonctions d’une frontière dès l’Antiquité. Cette zone marque la limite entre l’empire romain et d’autres peuples qu’il considère comme barbares -Vocabulaire p.198, matérialisée de façon discontinue par des fortifications. Elle est le résultat direct des choix stratégiques de Rome.

Cette étude conduit à souligner un paradoxe qui sous-tend l’existence même de cette frontière. L’Empire romain se fonde en effet sur le projet de domination universelle de Rome et de construction d’un État-monde dont les seules limites sont en théorie celles du monde connu ; or le limes rhénan pose la question de la construction d’une limite étatique.

Comment fonctionne le limes rhénan, coupure géopolitique décidée et construite par Rome pour protéger le monde romain des peuples non-romanisés ?

1.     Le limes : contexte et définition

Chronologie p.198 + Carte p.199- À partir du règne d’Auguste (27 av. J.-C.-14 apr. J.-C.) et jusqu’au IIe siècle, l’Empire connaît une forte expansion (Germanie, Maurétanie, Thrace, Arabie, Bretagne, Dacie…) mais les Romains subissent aussi des échecs :

  • face aux Parthes, ils ne parviennent pas à conserver la Mésopotamie et l’Arménie ;
  • en Bretagne, les Calédoniens les empêchent de conquérir la totalité de l’île ;
  • ils ne parviennent pas à annexer et pacifier -Pacification : vocabulaire p.198 la Germanie[5].

Ils doivent donc se résigner : Rome ne pourra pas contrôler l’univers. D’où l’instauration du limes.

 Le terme de limes désigne, dans son acception générale, l’ensemble des limites de l’empire romain ainsi que ses aménagements. Il s’agit ici d’en saisir les fonctions, notamment protectrices. En effet, cette ceinture défensive, qui connaît son point culminant au IIe siècle après J.C., correspond à un système frontalier et militaire.

Néanmoins, cette frontière mouvante n’est pas une frontière au sens actuel du terme. Son tracé ne résulte pas d’un accord entre États souverains, mais de la seule volonté de Rome de fixer des limites, de s’y maintenir ou de les modifier, sur les plus de 5 000 km de la périphérie de l’Empire. Si le limes s’appuie parfois sur le cours des fleuves (Rhin, Danube, Euphrate), il ne cherche pas forcément à coïncider avec des éléments naturels. Et si sa principale fonction est militaire, il n’est pas conçu comme une barrière uniformément infranchissable. Il n’est fortifié qu’à certains endroits, au nord de la Bretagne[6] et entre le Rhin et le Danube. Et même là, sa vocation n’est pas purement défensive.

2.     Le limes rhénan

Les vestiges archéologiques témoignent de l’existence, le long du Rhin (et jusqu’au Danube), d’un ensemble architectural, le limes, correspondant au système défensif de l’empire romain contre les Germains -Carte + Chiffres-clés p.200. Sur une longueur de 550 kilomètres, elle est composée de levées de terres, de fossés, de fortins, de tours de guets, de palissades[7] -doc.4 p.201. Une frontière militaire, de champs cultivés pour ravitailler les camps de légions en place. Ce complexe témoigne du développement de l’architecture militaire romaine et de la connaissance fine de la topographie des territoires limitrophes du Rhin. Les soldats construisirent de grands camps pour des légions, à Xanten et Bonn sur le Rhin inférieur, à Strasbourg et Mayence sur le Rhin supérieur. Ils ajoutaient dans les intervalles des forts plus petits et des tours. Ils tracèrent aussi un réseau routier, longeant le fleuve ou allant soit vers l'avant, en territoire ennemi, soit vers l'arrière. Là où ils pouvaient appuyer leur défense sur le cours du Rhin, au nord, ils s'en contentèrent.

Il y a dans l’esprit des Romains une imbrication entre politique défensive et construction d’un signe de puissance[8]. Le limes permet le contrôle des déplacements dans les marges de l’empire, c’est-à-dire dans les confins extérieurs, ici sur le limes de la Germanie Supérieure et de la Rhétie. Fixer les limites de la réalité de la conquête romaine par une ligne de contrôle militaire, fonctionnant comme « horizon défensif », sert la politique de puissance de Rome face auxdits barbares. Son but est de contrôler les mouvements de population et de marquer la présence de Rome aux confins du monde considéré comme civilisé. Fruit d’une stratégie romaine visant à séparer les Romains des non-Romains, le limes se caractérise par une présence à la fois civile et militaire.

À la fin du IIe siècle, l’armée romaine est composée de trente légions de 5 000 hommes, soit 150 000 légionnaires[9] positionnés aux frontières de l’Empire. La présence de l'armée en Rhénanie transforma profondément la région, d'abord dans le domaine économique. En effet, les soldats touchaient une solde relativement élevée, ce qui en faisait des privilégiés[10]. Leur présence attirait des civils : commerçants, artisans... Stimulées par cette présence militaire, les activités économiques se développent. La principale production, comme partout dans l'Antiquité, était le blé. Il faut lui ajouter l'élevage des chevaux et des bovins, les productions d'un artisanat actif (métallurgie, verrerie, céramique) et le commerce. Les soldats, parce qu'ils étaient citoyens romains, se conduisaient différemment des civils. Ils faisaient cuire leurs aliments dans l'huile et pas dans le beurre, et buvaient du vin et non de la bière ou de la cervoise. Ils en importaient donc et les archéologues ont trouvé de grandes quantités d'amphores : l'huile venait de l'Espagne du Sud et le vin d'Italie.

De la sorte, se créa au nord de la Gaule, comme au demeurant autour de tout l'empire, une véritable ceinture dorée. Doc.3 p.201. « Un secteur vivant »- De fait, le limes est une zone privilégiée de contact entre populations très diverses : Romains, légionnaires issus de tout l’Empire, marchands, peuples conquis et « barbares » originaires de l’autre côté de la frontière -doc.2 p.200. Les peuples du Rhin vus par un historien romain. Ces contacts contribuent à la diffusion du modèle romain aux limites de l’Empire. La zone de grande prospérité était aussi une zone de forte romanisation -doc.5 p.201. Une zone d’échanges culturels. Bien sûr, les militaires appréciaient davantage les aspects les plus vulgaires de la culture romaine, et l'on trouve plus d'amphithéâtres que de théâtres près des camps. Mais les villes se multipliaient, avec des places ou forums, des basiliques, des thermes, des temples, et tous les monuments qu'on y trouve d'habitude. Pourtant, les dieux indigènes conservèrent leurs fidèles, aussi bien d'ailleurs chez les Romains que chez les Gallo-germains : tous honoraient des déesses Mères, comme Nehalennia, et un Jupiter qui tuait un monstre appelé l'anguipède. Ils leur ajoutaient les cultes romains, et notamment le culte impérial très pratiqué à Cologne.

En accordant la citoyenneté romaine à tout homme libre de l’Empire, l’édit de Caracalla, en 212, confirme le limes dans sa fonction de zone de transition entre le monde civilisé et le monde barbare.

B.    Pour se partager des territoires : la conférence de Berlin (1885) et le partage de l’Afrique

Jalon p.204-205, chronologie p.204- Limitée depuis l’époque moderne à quelques régions côtières, la colonisation de l’Afrique connaît une accélération dans la seconde moitié du XIXe siècle -Doc 3 p 205. Le Petit journal, 2 novembre 1913.

Il est question ici de réfléchir à la fonction de la frontière comme instrument de construction d’entités politiques dans le contexte de la conquête puis de l’administration des territoires en Afrique par les puissances européennes concurrentes. Fruit d’un traité, le tracé de ces frontières légitime une projection de souveraineté. Il délimite l’organisation spatiale du pouvoir et des sphères d’influence des puissances impériales à la fin du XIXe siècle. Parmi les principaux « traceurs historiques », on trouve la France et le Royaume-Uni. Ces acteurs principaux signent 249 traités frontaliers pour l’Afrique occidentale entre 1882 et 1905. Au cœur de la signature des accords fixant la localisation des frontières, se jouent les rapports de forces politiques et les conflits d’intérêts dans le cadre de la rivalité coloniale franco-britannique[11].

La conférence de Berlin éclaire sur les enjeux du tracé des frontières pour délimiter des territoires et leur conséquence pour les États et les populations en Afrique.

Comment, dans le contexte de la conquête coloniale en Afrique, le tracé des frontières a-t-il précédé la construction d’entités territoriales et politiques effectives et concurrentes ?

1.     La conférence de Berlin, une conférence pour partager l’Afrique ?

a.       Le contexte

14 États (12 États européens, l’Empire ottoman, les Etats-Unis) se retrouvent du 15 novembre au 26 février 1885 à Berlin. L’Allemagne est devenue une grande puissance continentale européenne depuis son unification en 1871. La conférence est organisée par le chancelier allemand, Otto von Bismarck.

La presse de l’époque (comme L’Illustration) diffuse l’idée que les principales puissances coloniales (France, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Portugal, Empire ottoman, Italie et Espagne) se partagent, par le tracé des frontières, les territoires de l’Afrique. À ce titre, il est intéressant de travailler sur les discours qui construisent, au moment où la colonisation n’est pas pleinement effective, cette représentation du « partage de l’Afrique ». Cela conduit alors d’une part à montrer que le processus relatif au tracé des frontières s’est effectué, lui, dans le cadre d’accords bilatéraux entre les différents acteurs en jeu et, d’autre part, à rappeler que la fixation de ces frontières a constitué un instrument de création de territoires coloniaux souverains et de sphères d’influence des empires de conquête. Ces frontières doivent ainsi être analysées comme le résultat d’un rapport de forces politiques entre les puissances européennes.

b.      Les objectifs

Si la conférence de Berlin (15 novembre 1884 - 26 février 1885) est devenue le symbole du « partage de l’Afrique » -doc.1 p.204. Une conférence pour partager l’Afrique ?, elle avait en réalité pour objectif d’encadrer la présence européenne sur le sol africain afin d’éviter les conflits lors de la prise de possession de nouveaux territoires et de répartir les zones d’intervention militaire respectives. À l’origine, il s’agit de régler des tensions à propos du commerce dans le bassin du Congo entre d’une part, le Royaume-Uni et le Portugal et d’autre part, l’Allemagne et la France peu disposées à ce que les 2 premières dominent cette région.

Doc.2 p.204. Acte final de la conférence de Berlin, 26 février 1885- L’analyse de l’« Acte général » permet d’identifier les enjeux (économiques, politiques et moraux) qui ont sous-tendu la justification de la colonisation et qui ont défini ses règles : c’est le sens du point 4 de l’ordre du jour de Bismarck : « Définir des procédures à suivre pour les futures occupations européennes en Afrique à partir du littoral. ».

Il s’agit donc de réduire les tensions et d’éviter les conflits entre les puissances européennes.

c.       Les résultats

La conférence de Berlin n’est pas un partage de l’Afrique par les puissances européennes mais elle élabore le cadre et des règles de partage. Elle établit la liberté de navigation et de commerce. L’interdiction de la traite des esclaves est rappelée. Chaque nation colonisatrice pourra s’étendre de la côte vers l’arrière-pays jusqu’à rencontrer une zone occupée par une autre nation européenne. Après la conférence il faut que la présence soit effective sur un territoire pour le voir reconnu par des frontières internationales. Ainsi, cette disposition a accéléré les expéditions vers l’intérieur du continent.

Le seul effet direct de la conférence concerne le bassin du Congo convoité par les Portugais, les Anglais, les Allemands et les Français : c’est finalement un acteur neutre, le roi des Belges Léopold II qui l’emporte et y gagne une colonie et une immense fortune.

Les frontières des colonies africaines doivent plus aux accords bilatéraux entre puissances qu’à la conférence de Berlin -Chronologie p.204.

2. Les frontières coloniales, des frontières durables

Graphique p.202. Supports des frontières africaines actuelles + doc.5 p.205. Des frontières artificielles ? + Paragraphe IIIB p.203- Exercice : « Les frontières coloniales, des frontières durables ».

C.    Pour séparer deux systèmes politiques : la frontière entre les deux Corée

Jalon p 214-215, chronologie p.214- Longue de 248 km et large de 4 km, suivant approximativement le 38ème parallèle, allant de la mer Jaune à la mer du Japon qui a été ceinturée, la frontière entre les deux Corée constitue un cas emblématique d’une zone de séparation fermée, militarisée et matérialisée[12], malgré certains points de contact.

Vestige de la Guerre froide, cette frontière est souvent identifiée comme étant l’exemple type de la frontière fermée, surveillée par plus d’un million de soldats, séparant deux régimes politiques. L’objectif de ce jalon est de traiter la frontière fermée et militarisée qui vise à séparer deux modèles politiques antagonistes. L’existence de ce tracé, dont l’objectif est l’herméticité, est à analyser comme le résultat conjoint du rôle structurant de forces extérieures (États-Unis, Union soviétique, Chine) et de logiques internes au territoire coréen.

Comment fonctionne et se matérialise la frontière intercoréenne dont l’enjeu est de séparer physiquement et idéologiquement deux entités politiques totalement antagonistes ?

1.     Une frontière née au cœur de la Guerre froide

a.       Un enjeu entre les deux Grands dès 1945

Doc.1 p.214. Une frontière née de la guerre (1950-1953)- Lors de la conférence de Postdam (Juillet-Août 1945) une ligne de démarcation entre troupes d’occupation étatsuniennes et soviétiques est fixée provisoirement le long du 38ème parallèle. Dès 1946, il y a des tensions, chacun voulant imposer le retrait de l’autre. Au Nord, Kim Il Sung met en place un régime communiste qu’il veut étendre à toute la Corée. Au Sud, le nationaliste Syngman Rhee essaie d’entrainer les Américains (plus préoccupés par le Japon) pour unifier la Corée sous sa direction.

Une commission des Nations-Unies à laquelle les Soviétiques refusent de participer supervise les élections dans le Sud. Le Nord cherche à s’y opposer et veut organiser des élections concurrentes. La situation est insurrectionnelle, et le régime Sud-coréen se livre à des violences et des massacres, avec le soutien de « conseillers américains », qui aident Séoul à mener des opérations de contre-guérilla. En 1948, deux États sont proclamés, sous la présidence de deux dirigeants autoritaires, et la frontière se « solidifie ».

b.      La Guerre de Corée 

En juin 1950 les armées du Nord, équipées par les Soviétiques attaquent le Sud. Le Conseil de sécurité de l’ONU, en l’absence de représentation soviétique, condamne l’agression et demande de porter assistance au Sud. L’offensive des troupes de l’ONU, sous le commandement du général Mac Arthur, repousse les Nord-Coréens et les Américains entament la conquête de la péninsule, avant d’être contraints au repli par l’intervention de la Chine (1950-1951).

Ce n’est qu’en 1953 qu’est signé un cessez-le-feu instaurant une zone démilitarisée au niveau du 38ème parallèle -doc.2 p.214. La convention d’armistice (1953).

c.       Deux États qui n’ont pas la même stratégie de développement

Au Nord, se trouve la partie de la péninsule la plus industrialisée depuis la colonisation japonaise. L’aide du CAEM permet la reconstruction rapide d’infrastructures très rapidement, sur lesquelles la Corée du Nord s’appuie pour adopter un modèle de développement stalinien. Mais aux premières réussites, la stagnation économique succède assez rapidement.

Au Sud, règne le clientélisme, et la corruption, endémique sous Syngman Rhee (1948-1960), et le pays stagne malgré l’aide économique des États-Unis. Le coup d’état de Park Chung Hee en mai 1961 change la donne en ouvrant une période de changements :

  • On assiste d’abord à un développement économique rapide, favorisé par la mise en place d’un conseil de planification économique (industrie légère puis industrie lourde, chimie)[13]
  • Plus tardivement (à partir de 1987), débute la démocratisation du pays.

2.     La dernière frontière de la guerre froide ?

a.       Un système frontalier

Au cœur du système, se trouve la ligne de démarcation militaire (Military Demarcation Line, ou MDL) qui sert de limite frontalière entre les deux Corée ; elle suit approximativement le 38ème parallèle, et ses

caractéristiques soulignent la singularité du cas : une ligne correspondant à un cessez-le-feu est transformée en frontière politique. Cette MDL est entourée par une zone tampon qualifiée de « Zone Démilitarisée » (DMZ en anglais, pour Demilitarized Zone). C’est une bande de terre de 250 km de long sur environ 4 km de large sur la ligne de cessez-le-feu de 1953[14]… mais la zone est loin d’être démilitarisée. Doc.3 p.215. Une frontière bien gardée- La DMZ est ceinturée par des réseaux de barbelés, clôtures électroniques, champs de mines, miradors, batteries d’artillerie et postes militaires régulièrement espacés et des tranchées qui en bordent les limites externes. Ce « paysage géomilitaire », sur une largeur de 4 kilomètres (2 kilomètres de chaque côté de la ligne de séparation), est fermé par un double mur de 3 à 4 mètres de haut surmonté par des barbelés et surveillé par des patrouilles militaires : pour garder la frontière, 600 000 soldats sont postés au sud et 1 million au nord[15]. La DMZ abrite une Zone de sécurité conjointe (JSA), Panmunjom, localité constituée d’une série de bâtiments centrés autour de plusieurs cahutes bleues de l’ONU, lesquelles sont situées en plein sur la MDL. Ces baraquements sont devenus emblématiques de la division de la péninsule : l’armistice de 1953 fut signé dans un bâtiment situé du côté nord du village, et c’est le seul endroit de la DMZ où soldats sud et nord-coréens se font face (ils sont désormais désarmés). L’endroit est fréquemment utilisé pour des pourparlers entre Pyongyang et Séoul. En Corée du sud, la Civilian Control Line (CCL) se déploie entre 5 et 20 km derrière la DMZ. Elle comporte 81 villages et 40 000 habitants. La circulation et les activités civiles y sont restreintes et étroitement contrôlées.

Les limites maritimes n’ont toujours pas été établies et constituent un sujet de tension supplémentaire : l’ONU attribue à Séoul un groupe d’îles situées près de la côte nord-coréenne. Pyongyang n’a pas reconnu ce tracé, et revendique un nouveau tracé depuis 1999 : la Corée du Nord y renonce aux îles mais étend la ZEE au sud. Depuis, les incidents se sont multipliés en mer Jaune, et il y a de nombreux incidents liés aux zones de pêche.

Mais de fait, les enjeux géopolitiques dépassent largement la seule confrontation de deux États, à trois échelles : locale, régionale et planétaire. Cette frontière politique intercoréenne fonctionne, par exemple, comme glacis stratégique pour la Chine, comme un instrument de stabilisation politique et militaire pour les États-Unis et comme un point d’équilibrage des forces régionales pour le Japon.

b.      Un espace fermé

Les deux Corées sont toujours techniquement en guerre : les incidents militaires, les creusements de tunnel d’évasion n’ont jamais cessé, ils ont fait 1400 victimes depuis 1953. Si quelques soldats nord-coréens font régulièrement défection pour passer au Sud à travers la DMZ, sa traversée est particulièrement dangereuse. Sa fermeture quasi-hermétique explique que les quelques dizaines de milliers de nord-coréens qui ont gagné la Corée du Sud depuis 1953 passent pour l’essentiel par la frontière chinoise, au risque parfois d’être remis aux autorités de Pyongyang selon le contexte politique et diplomatique.

Toutefois, l’imperméabilité de la frontière doit être relativisée. En 1991, à la faveur de la fin de la guerre froide, un pacte de non-agression et de coopération est conclu ; la Corée du Nord et la Corée du Sud entrent à l’ONU. Dès 1998, Hyundai Asan a proposé une visite touristique au nord de la DMZ. Depuis des points d’observation et des terrasses sont parfois installées dans les sites les plus adaptés pour « voir » de l’autre côté. Près de 500 personnes ont voyagé pour affaires entre 1998 et 2008 et par ailleurs du fret et de l’aide alimentaire sont passées. Mais en 2008, à la suite d’un accident grave[16], les déplacements touristiques sont interrompus.

Nous sommes en présence d’un cas inédit de frontière issue d’un conflit conclu par un armistice mais dont les deux parties, en l’absence de signature de traité de paix, demeurent de facto en état de guerre. Doc.4 p.215. Une tentative d’ouverture dans les années 2000- La politique du « rayon de soleil » de 1998 à 2008 a rendu cette frontière timidement perméable dans le sens Sud-Nord. Depuis le début des années 2000, des zones de rencontre familiales ont été établies près de la frontière. Organisées et orchestrées par les deux États, ces rencontres entre membres de familles séparées par la frontière ont lieu sous haute surveillance et sont fortement médiatisées. En 2002 pour la première fois les voies de chemin de fer ont été reconnectées et en 2003 les routes réouvertes : deux points de passage ont été établis. Ces dernières années, des tentatives de rapprochement ont eu lieu, à l’occasion des JO d’hiver de 2018 (PyeongChang, Corée du Sud)[17], et de multiples rencontres entre les chefs d’État du Nord et du Sud -doc.5 p.215. Une rencontre officielle à Panmunjom (2018) qui permettent aux Coréens les plus optimistes de rêver à une possible réunification.

Néanmoins, le chemin vers la disparition de cette frontière semble encore long. En effet, trente ans après la fin de la guerre froide est terminée, la DMZ continue de nourrir une instabilité diplomatique, compliquée par le chantage nucléaire depuis que Pyongyang a accédé à l’arme atomique grâce à la Chine (premier essai nucléaire réussi en 2006), qui se poursuit malgré la rencontre entre le dirigeant Nord-coréen et le président des Etats-Unis à Singapour en juin 2018 puis sur la DMZ en juin 2019[18].

II. Les frontières en débat (Axe 2)

L’objectif de cet axe est de présenter les débats que soulèvent certaines frontières, qu’elles soient disputées et négociées ou qu’elles fassent l’objet d’une concertation à une échelle mondiale. Les formes et les fonctions des divisions politiques du monde suscitent des débats. Le cas de la frontière germano-polonaise, entre dispute et négociation, souligne le potentiel conflictuel de la frontière, qui peut aller jusqu’à l’affrontement militaire. Or, le droit de la mer propose un dépassement des frontières par la concertation et la négociation. Si des disputes sur le tracé de ces limites existent, elles n’ont pas jusqu’à présent débouché sur des conflits armés.

Comment se manifestent les débats sur les divisions politiques du monde, entre disputes, négociations et concertations ?

A.    Reconnaître la frontière : la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990, entre guerre et diplomatie.

Les formes et fonctions des frontières font débat, comme en témoigne le cas de la frontière germano-polonaise de 1939 à 1990, source d’affrontement pendant la Seconde Guerre mondiale puis objet de débat et négociation diplomatique pendant la guerre froide, avec des conséquences importantes pour les populations concernées, polonaises et allemandes.

Ce jalon a pour enjeu de comprendre comment et pourquoi le tracé de la frontière germano-polonaise est en débat de 1939 à 1990, un débat marqué par l’instabilité, la conflictualité et la négociation. Oscillant entre guerre et diplomatie, le processus de fixation de cette frontière éclaire le difficile parcours historique et géopolitique vers la reconnaissance du tracé de la frontière, non seulement par les deux parties directement concernées (Allemagne et Pologne), mais aussi par la communauté internationale[19].

Pour quelles raisons, comment et par qui la frontière germano-polonaise est-elle fixée et reconnue entre 1939 et 1990 ?

C’est par la signature, le 14 novembre 1990, du traité germano-polonais que la frontière entre les deux États (Allemagne et Pologne), fixée pour l’essentiel le long de la Neisse et de l’Oder, est définitivement reconnue, par un accord diplomatique ratifié par les deux Parlements en 1991. Ce traité de paix clôt un conflit latent entre les deux nations relatif au tracé de cette frontière demeuré provisoire et débattu depuis 1939, par les armes et par les négociations.

1.     Le glaive et le crayon : une frontière récente et disputée (1939-1945)

c.       Une frontière issue de la Première Guerre mondiale

Le traité de Versailles (28 juin 1919) a conduit à la réapparition d’un État polonais, ce qui contraint à délimiter l’espace de sa souveraineté et donc sa frontière avec son voisin allemand[20]. Se posent comme questions lors de ce tracé :

  • l’accès à la mer Baltique et ses implications géopolitiques,
  • l’existence de minorités et la question de la Silésie
  • le statut nouveau de Dantzig qui devient une ville libre placée sous la protection de la Société des Nations.
  • la discontinuité imposée au territoire allemand, la Prusse orientale étant coupée du reste de l’Allemagne.

d.      Le pacte germano-soviétique

Dès 1938, l’Allemagne nazie bouleverse les frontières continentales, pour agrandir le Reich et conquérir un précieux « espace vital » à l’Est : l’Anschluss de l’Autriche et l’annexion des Sudètes (Tchécoslovaquie) en 1938, puis l’offensive contre la Pologne qui déclenche la Seconde Guerre mondiale. Cette offensive se déroule conformément aux protocoles secrets du pacte germano-soviétique (23 août 1939) -Vocabulaire p.224 qui ouvrent entre autres la possibilité d’un partage de la Pologne avec l’Union soviétique : Hitler lance l’invasion de la Pologne le 1er septembre 1939, Staline le 17 septembre.

Doc.1 p.226. Le partage de la Pologne entre l’Allemagne et l’URSS en 1939- La frontière germano-polonaise disparaît en même temps que la souveraineté polonaise : une partie du territoire polonais est incorporée au Reich. Après la rupture du pacte germano-soviétique en juin 1941, l’Allemagne envahit la partie occupée jusque-là par les Soviétiques, qui devient un « protectorat » -Doc.2 p.226. Les frontières de la Pologne (1939-1945). Tout au long du conflit, ces territoires sont soumis à une politique de germanisation particulièrement brutale de la part des autorités nazies : extermination de l’élite polonaise locale, expulsions de Polonais en masse, colonisation de ces régions par des Allemands rapatriés d’Union soviétique.

e.      À l’issue de la Seconde Guerre mondiale

À partir de 1943, le sort de la frontière occidentale polonaise est étroitement lié à celui de la frontière orientale. Avec la perspective de devoir céder une partie importante de leurs terres à l’est, les dirigeants, experts et diplomates polonais soumettent l’Allemagne à des revendications territoriales de plus en plus importantes. Dès 1944, lors des conférences préparant l’issue du conflit (Protocole de Londres le 12 septembre, Accords de Londres le 14 novembre), s’établissent des rapports de force. À l’été 1944, le gouvernement prosoviétique de Lublin et Moscou se mettent d’accord pour revendiquer la ligne Oder-Neisse comme nouvelle frontière germano-polonaise et pour céder les confins orientaux à l’Union soviétique (L’URSS est la grande bénéficiaire des règlements territoriaux qui affectent l’Europe de l’après-guerre). Lors de la conférence de Potsdam, les Alliés occidentaux acceptent ce nouveau tracé (article 9).

Les accords mentionnent le caractère provisoire de la frontière dans l’attente d’un « prochain règlement de paix » : par exemple, la Poméranie et la Silésie sont notées comme « territoires sous administration polonaise ». L’Allemagne n’existe alors plus en tant qu’État et l’Allemagne occupée (1945-1949) n’a plus d’autres frontières que celles des quatre zones alliées. La « ligne Oder-Neisse », fixée par une convention internationale (URSS, États-Unis, Royaume-Uni), est le fruit d’une négociation entre États tiers. Mais la convention n’est pas reconnue par les principaux intéressés : cette frontière reconnue internationalement par des pays tiers s’apparente à une frontière « naturelle » puisqu’elle suit deux cours d’eau, mais, comme toutes les frontières, ce n’est pas la nature qui la détermine, elle résulte de choix politiques et de négociations[21]. Des enjeux supérieurs ont prévalu comme l’absorption de la Pologne orientale et de Königsberg par l’URSS, faisant glisser le territoire polonais de l’est vers l’ouest sur près de 200 kilomètres. Plusieurs arguments plaident contre la frontière « naturelle ». Tout d’abord, la Neisse retenue est celle de l’ouest et l’Oder n’est pas suivi jusqu’à son embouchure, puisque l’ensemble de la ville de Stettin (Szczecin) est sous souveraineté polonaise. Ensuite, elle n’épouse pas davantage les réalités nationales, car de nombreux Allemands vivent à l’est de la ligne et des Polonais à l’ouest.

2.     Les mémoires meurtries et les frontières en débat après 1945

a.        RFA/RDA : le contexte de la guerre froide

La restauration d’une souveraineté allemande, avec la création de la RFA (République fédérale d’Allemagne) -Vocabulaire p.225 et de la RDA (République démocratique allemande) -Vocabulaire p.225 en 1949 (respectivement le 23 mai et le 7 octobre) pose, à nouveau, la question de la reconnaissance de la frontière germano-polonaise.

L’antagonisme idéologique et géopolitique des Alliés, matérialisé par le « rideau de fer », qui coupait l’Europe en deux, et notamment l’Allemagne sur une longueur de 1 393 km, exacerba la question allemande.

Les décisions prises sont, dans un contexte de guerre froide, diamétralement opposées :

  • La RDA, limitrophe de la Pologne et sous influence soviétique, conclut dès le 6 juillet 1950 l’accord de Görlitz[22] qui reconnaît la frontière Oder-Neisse. Ouvertement nationaliste pendant la période de constitution du pouvoir communiste (1945-1948)[23], l’argumentaire polonais prend des teintes nettement socialistes à l’ère de la stalinisation : l’accord trouvé entre ces deux pays communistes sous tutelle soviétique, surjouant l’unanimisme de façade et la fraternité socialiste, scelle artificiellement une réconciliation germano-polonaise avant l’heure, et se présente comme un gage de leur volonté d’assurer une paix fragile à l’ère atomique, la ligne Oder-Neisse devenant alors « la frontière de la paix » -doc.1 p.228. La frontière vue de la RDA.
  • La RFA prend le contre-pied et ne reconnaît pas cette frontière en se référant directement à la situation d’avant 1939. La RFA se tient à cette position d’une Allemagne unie qui seule peut conclure un traité incontestable en droit international sur la reconnaissance de cette frontière. Elle adopte cette position de rejet dès l’élaboration de sa Loi fondamentale[24]: le Bundestag déclare lors la déclaration solennelle de sa première réunion que le territoire à l’est de la ligne Oder-Neisse est « toujours une partie de l’Allemagne ». La République fédérale d’Allemagne, contrairement à l’Allemagne de l’Est, a mis longtemps à reconnaître le statu quo international issu de la Seconde Guerre mondiale[25]. Selon la thèse des juristes ouest-allemands, la RFA est l’héritière administrative du IIIe Reich, et l’Allemagne n’ayant pas signé de traité de paix, les frontières de 1937 sont seules valables et intangibles. Symboliquement, les cartes de manuels ou d’atlas ouest-allemands indiqueront encore longtemps le tracé, en pointillés, de l’ancienne frontière de 1937 à l’intérieur du territoire polonais ; quant aux « territoires recouvrés » polonais, ils sont considérés comme des « régions provisoirement sous administration polonaise »[26].

b.       L’Ostpolitik et le renoncement aux anciennes provinces orientales

Doc.5 p.227. Vu de la RFA, une frontière inacceptable- Le discours révisionniste de la CDU (au pouvoir en RFA depuis 1949) face à la frontière Oder-Neisse est de plus en plus formel, et la remise en cause de la frontière issue de Potsdam perd de son actualité. Dès les années 1960, il est essentiellement un argument électoral dans la course aux voix face au SPD, notamment sur la douloureuse question des réfugiés allemands -doc.3 p.227. Le sort des réfugiés allemands après la guerre. Avec l’alternance politique et l’arrivée du SPD de Brandt au pouvoir en 1969, l’Ostpolitik concrétise la résignation d’une part sans cesse croissante des élites politiques allemandes face à la frontière Oder-Neisse -doc.3 p.228. « La fin d’une illusion ».

L’année 1970, qui voit la mise en œuvre de l’Ostpolitik -Vocabulaire p.229 par le chancelier ouest-allemand Willy Brandt -Biographie p.229, est un moment charnière de recherche d’un compromis. D’où la signature des traités de Moscou (12 août 1970) avec l’URSS et de Varsovie (7 décembre 1970) avec la Pologne, qui reconnaissent la ligne Oder-Neisse comme frontière d’État et indiquent que la RFA renonce à une souveraineté allemande ultérieure sur des territoires désormais polonais -. La diplomatie ouest-allemande, une fois la frontière reconnue en 1970, s’attache principalement à développer les liens économiques avec les pays de l’Est et en premier lieu la Pologne, et à rapatrier des Allemands encore présents dans ce pays, notamment en Haute-Silésie et en Varmie-Mazurie.

Malgré sa reconnaissance précoce par la RDA, la question de la frontière Oder-Neisse reste ambigüe en arrière-plan des relations complexes entre RDA et République populaire polonaise (la logique nationale n’est pas morte contrairement à ce que l’on pense souvent). Les tensions ont régulièrement existé entre l’État est-allemand et la Pologne communiste, que ce soit sur la question du rapatriement des Allemands de Pologne ou sur la politique communiste polonaise, jugée trop libérale par le SED, longtemps garant de l’orthodoxie stalinienne. L’un des conflits les plus symboliques mettant en jeu la ligne Oder-Neisse concerne le tracé même de la frontière maritime entre les deux pays, dans le prolongement de la frontière terrestre. Il porte sur la délimitation des eaux territoriales entre la RDA et la RPP dans la baie de Szczecin et dure de 1985 à 1989[27]. Ce conflit tardif montre le caractère éminemment problématique du tracé de la nouvelle frontière germano-polonaise, près d’un demi-siècle après sa création, et entre deux partenaires censés être des alliés idéologiques.

3.     La frontière d’un nouveau monde : la frontière germano-polonaise et le monde post-guerre froide

Il faut attendre la chute des démocraties populaires, et la marche vers la réunification allemande (octobre 1990) pour que l’épineuse question de la frontière Oder-Neisse soit définitivement tranchée. La déclaration commune du Bundestag ouest-allemand et de la Vokskammer est-allemande du 21 juin 1990 va dans ce sens -doc.4 p.229. La reconnaissance définitive. Avec la réunification, la RFA étend ses institutions et son droit à la RDA et devient de facto frontalière avec la Pologne. Sous la pression internationale et du fait de la prise de conscience des implications de la nouvelle situation par ses dirigeants[28], la RFA abroge en août 1990 l’article de la Loi fondamentale qui revendiquait une souveraineté allemande à l’est de la ligne Oder-Neisse.

Les frontières extérieures de l’Allemagne réunifiée reprennent globalement celles de 1937, excepté à l’Est où la Pologne conserve définitivement les anciens territoires allemands à l’est de la ligne Oder-Neisse. Le tracé définitif est acté par le traité de Moscou du 12 septembre 1990[29] (dit 4+2), signé par les quatre puissances (États-Unis, URSS, Royaume-Uni et France) ainsi que les deux républiques allemandes. Il règle « définitivement dans les termes obligatoires en droit international » le statut des frontières. La signature de ce traité, garanti par les quatre puissances, est la condition sine qua non à la réunification allemande. Toute modification de la frontière germano-polonaise étant soumise à l’accord des quatre puissances, elle devient dans les faits intangible, on évoque le « caractère définitif des frontières de l’Allemagne Unie », alinéa 1, article 1. Il est suivi, après la réunification, par un traité germano-polonais (14 novembre 1990) ratifié par le Bundestag allemand et la Diète polonaise -doc.5 p.229. La normalisation des relations germano-polonaises après la guerre froide.

On peut en conclure que la fixation de la frontière germano-polonaise a permis la consolidation de l’Europe et de l’État allemand : un État reconnu par ses voisins et dont l’identité nationale et territoriale peut désormais se refléter dans la clarté et la continuité de sa ceinture frontalière.

B.    Dépasser les frontières : le droit de la mer

Les délimitations maritimes : quels enjeux géopolitiques, formes et fonctions de ces divisions politiques des mers et océans ?

Ce jalon a pour objectif de montrer que les divisions politiques du monde peuvent prendre des formes et fonctions originales en mer, du fait de la spécificité du milieu. Sur la terre ferme, les frontières peuvent être définies comme les limites spatiales de souveraineté politique des États, facilement identifiables et en partie matérialisées, et s’appuyant parfois sur des éléments topographiques dans leurs tracés (fleuves, lignes de crêtes…). Ceci est inenvisageable en mer. Dans le milieu bien spécifique des mers et océans, le droit international cherche à dépasser les frontières en proposant une autre division politique du monde qui se construit sur des fondements différents. Le droit de la mer -Vocabulaire p.236 a été élaboré pour répondre par des négociations aux enjeux de répartition des ressources, de libre navigation et de sécurité des États côtiers.

1.     De l’unité juridique au partage de l’océan

Les mers et les océans ont longtemps été considérés comme « sans frontière ». Tous les navires « inoffensifs », c’est-à-dire ne portant pas atteinte à la sécurité des États côtiers, pouvaient naviguer sans entrave. Cette doctrine de la liberté des mers (mare liberum, mare clausum) fut établie par les juristes néerlandais et anglais Hugo Grotius et John Selden au XVIIe siècle. L’idée de frontières maritimes naît au XVIIIe siècle. Les puissances maritimes européennes (Espagne, Pays-Bas, France…) établirent alors la règle des trois milles marins, distance qui représentait la portée des canons de l’époque. Les espaces maritimes furent donc séparés en deux par une frontière : d’une part, les eaux territoriales, sous souveraineté nationale -Souveraineté maritime. Vocabulaire p.237, d’autre part, la haute mer internationale. Le principe de liberté qui voue les océans à la libre communication entre les peuples assura ainsi, jusqu’au milieu du XXe siècle, une grande unité juridique à l’espace maritime. Cette quasi-indivision de l’océan mondial a perduré jusqu’au milieu du XXe siècle.

En moins d’un quart de siècle, l’océan subit un véritable processus de découpe, lors de deux phases successives de codification du droit international de la mer, en 1958 puis surtout en 1982. Le droit de la mer qui en résulte est le résultat de négociations longues et difficiles, qui ont amputé d’un tiers de sa superficie l’ancien espace international de haute mer. Doc.2 p.240. Une histoire récente du droit de la mer- Après une première codification par les quatre conventions de Genève de 1958[30], plus de vingt ans s’écoulent entre le début des négociations en 1973 sur le droit de la mer et l’entrée en vigueur en 1994 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM). Cette convention, dite de Montego Bay du nom de la ville de Jamaïque où l’accord est adopté en 1982 avant d’entrer en vigueur en 1994, est la concrétisation de ces négociations[31]. Cette « constitution pour les océans » accélère un processus de découpage et de territorialisation des espaces maritimes -Vocabulaire p.237, selon un principe simple : plus on est proche des côtes d’un État, plus les droits souverains sont importants, plus on s’en éloigne, plus la liberté est grande -Schéma p.236. La territorialisation des espaces maritimes + Jalon p.240-241[32].

La limite des eaux territoriales a été élargie par la Convention de Montego Bay à 12 milles marins (22 km)[33] -Vocabulaire p.237 depuis le trait de côte[34]. La souveraineté sur les eaux intérieures et mers territoriales confère aux États côtiers des droits exclusifs pour l’exploitation de leurs ressources minérales, énergétiques et biologiques.

Sur 12 milles marins supplémentaires, s’étend la zone contiguë, dans laquelle l’État côtier a le droit de prévenir et réprimer les infractions à ses lois et règlements douaniers, fiscaux, sanitaires ou d’immigration.

Il ne s’agit toutefois que de droits souverains et d’un exercice de juridiction et non d’une souveraineté pleine et entière. Les autres États y bénéficient, par conséquent, des libertés de navigation (« droit de passage inoffensif »), de survol ou de poser des pipelines et des câbles sous-marins. La limite des eaux territoriales ne constitue donc pas une frontière au sens terrestre du terme, et le régime de la ZEE est davantage lié à celui de la haute mer qu’à celui de mer territoriale. L’État peut néanmoins garantir sa sécurité, y compris environnementale, en imposant des réglementations aux navires qui exercent leur droit de passage.

Au-delà des eaux territoriales, s’étend la zone économique exclusive (ZEE) -Vocabulaire p.237, jusqu’à 200 milles marins du trait de côte (370 km). La liberté de navigation et de survol est garantie, mais en échange, les États côtiers y disposent de « droits souverains » pour l’exploitation des richesses et de « juridiction », principalement pour la protection de l’environnement. Il s’agit donc d’une souveraineté économique et non politique. NB : la CNUDM prévoit une extension possible des droits sur le sous-sol marin en cas de reconnaissance de l’extension du plateau continental[35] -Vocabulaire p.242 de l’État côtier, jusqu’à un maximum de 350 milles marins (480 km) par les Nations unies. L’État riverain y exerce des droits exclusifs d’exploration et d’exploitation des ressources naturelles, souvent très riches en nodules polymétalliques, minéraux ou espèces biologiques sédentaires.

Au-delà de 200 milles depuis le trait de côte, s’étend la haute mer : la liberté des mers y règne, le droit applicable est celui du pavillon national des navires qui y croisent. Les fonds marins font partie du patrimoine commun de l’humanité.

Doc.4 p.241. Le droit limite le découpage de l’océan- Ainsi, à l’exception des eaux intérieures (en-deçà du trait de côte) assimilées au territoire national, la liberté de circulation est garantie par le droit sur toutes les mers, même pour des navires militaires. Ceci constitue donc une belle illustration de dépassement des frontières. Il est important de bien préciser la dimension quasi universelle de ce droit de la mer. La recherche du consensus et de l’unanimité dans les négociations a permis d’adopter une convention ratifiée par presque tous les États du monde. Hormis certains pays enclavés -Vocabulaire p.238, seuls quelques pays côtiers comme Israël, la Turquie, le Venezuela ou les États-Unis ne l’ont pas ratifiée[36].

Le phénomène de mondialisation a renforcé le processus d’appropriation des espaces maritimes. Depuis 1982, 35% du domaine maritime mondial ont été appropriés par les États -doc.3 p.238-239. Mers et océans, des enjeux multiples, et certains d’entre eux possèdent d’immenses espaces maritimes[37] -doc.2 p.238. États et ZEE. Néanmoins,

  • le régime des détroits internationaux -Vocabulaire p.236 (Bosphore, Malacca…) garantit sur ces bras de mer le libre transit de la navigation internationale, qui ne peut en aucun cas être suspendu par leurs États côtiers.
  • « Biens communs mondiaux » selon la CNUDM, les espaces maritimes internationaux ne peuvent être appropriés ni revendiqués, et sont donc sans frontière.

2.     Les enjeux de la course à la mer

Carte p.238-239. Les mers et les océans : « nouvelle frontière » du monde-

 C’est quasi mathématique : plus on multiplie les zones maritimes avec des compétences diverses reconnues aux États côtiers, plus sont créées des limites à tracer et plus s’accroissent les risques de litiges.

La délimitation maritime, opération consistant à tracer une ligne de partage de souverainetés, résulte de considérations géographiques, mais aussi de l’évolution des rapports de force et de l’histoire des relations internationales. Elle relève alors, en pratique, de trois techniques différentes :

  • Elle peut être unilatérale et destinée à séparer un territoire national d’un espace international.
  • Elle peut également être conventionnelle et résulter d’un traité signé par deux États portant sur la séparation de leurs territoires maritimes.
  • Enfin, en cas d’échec des négociations, le tracé des frontières peut être juridictionnel ou arbitral. Dans cette hypothèse, l’utilisation de la ligne médiane s’impose pour la délimitation de la mer territoriale -Vocabulaire p.237, sauf en cas d’existence de titres historiques ou de circonstances spéciales.

De 1951 à 2015, vingt-cinq litiges ayant trait directement ou indirectement à la délimitation de zones maritimes sont venus devant la Cour internationale de justice (CIJ), le Tribunal international du droit de la mer (TIDM) et en arbitrage international. Les plus récents, actuellement en instance, concernent la délimitation maritime entre la Somalie et le Kenya (devant la CIJ) et la délimitation maritime entre le Ghana et la Côte d’Ivoire (devant le TIDM). Aujourd’hui, d’inquiétantes rivalités de puissance s’expriment :

  • De même, la mer de Chine méridionale est convoitée par plusieurs États côtiers en raison de ses ressources halieutiques et d’hydrocarbures et faisant l’objet d’une militarisation renforcée par l’occupation d’îlots jusqu’à peu inhabités.
  • Par ailleurs, l’exemple de l’Arctique est également intéressant à analyser, sous l’angle des différends entre les cinq États riverains (Canada, États-Unis, Danemark, Norvège et Russie), notamment au sujet de l’extension des plateaux continentaux --Jalon p.242-243 + Points de vue p.244-245.

Pour les juges ou les arbitres, il s’agit de rechercher ce que la convention de Montego Bay appelle la « solution équitable », un équilibre subtil entre, d’un côté, un ensemble d’éléments objectifs constitués du linéaire côtier pertinent, des circonstances particulières (la présence d’îles côtières par exemple) et, de l’autre, le souci de reconnaître à chacune des parties ce qu’elle peut raisonnablement escompter d’espace maritime sans se sentir lésée.

En attendant, il serait souhaitable que le droit de la mer du XXIe siècle soit un droit fonctionnel transcendant limites et exclusivités. Ce sont les grandes fonctions marines assumées par les États et les acteurs intervenant en milieu marin qui devraient prévaloir : fonction de sécurité, fonction environnementale et de protection du milieu, fonction de sauvegarde de la vie humaine, fonction de gestion raisonnée des littoraux, fonction de régulation de l’exploitation minière des fonds marins… fondées à l’échelle universelle sur des normes juridiques contraignantes qui seules permettront une véritable gouvernance internationale des océans, sans doute sous le couvert d’une future organisation océanique intergouvernementale.

III. Les frontières internes et externes de l’Union européenne (objet de travail conclusif)

Manuel p.250-269- L’analyse des frontières internes et externes de l’UE montre une grande diversité de formes et de dynamiques et révèle l’existence d’enjeux géopolitiques, économiques et sociaux. Il conviendra de mobiliser d’une part les notions d’effacement relatif des frontières internes de l’Union européenne, zones de contact et d’ouverture, mais aussi de mettre en lumière les tensions qui malgré tout à l’œuvre.

L’Union européenne, par sa construction progressive et ses finalités, vise à faire émerger une nouvelle entité politique supranationale qui remet en cause la division politique du monde entre États. Par exemple, avec le marché commun, l’Union européenne dispose d’une frontière extérieure commune vis-à-vis du reste du monde pour les marchandises[38], accompagnée d’une quasi-disparition des frontières internes entre États[39]. L’espace Schengen vise également cet effacement des frontières internes pour les flux de personnes mais son périmètre ne coïncide pas avec celui de l’UE. Néanmoins, le rétablissement de contrôles aux frontières et la non-adhésion de tous les pays de l’Union européenne à cet espace de libre-circulation des personnes soulignent les débats et affrontements liés aux frontières, dans le cadre d’un renforcement, voire d’une matérialisation, des frontières externes de l’Union européenne.

Quels sont les formes, fonctions et enjeux géopolitiques des frontières internes et externes de l’Union européenne ?

A.    Les enjeux de Schengen et du contrôle aux frontières

Cartes p.252-253. Les frontières internes et externes de l’Union européenne

1.     Un espace sans frontières internes ?

a.       Les mutations des frontières internes de l’Union européenne

L’Europe est traversée par un grand nombre de frontières. Elle possède 28% des dyades mondiales pour seulement 3,3% des terres émergées. Certaines de ses frontières figurent parmi les plus anciennes au monde, mais la moitié d’entre elles sont postérieures au démantèlement du bloc de l’Est à partir de 1990.

L’Union européenne présente un niveau d’intégration -Vocabulaire p.254 sans équivalent[40], illustré notamment par l’accord de Schengen (1985), qui instaure la libre circulation des personnes entre États signataires (« espace Schengen -Vocabulaire p.252 » depuis 1995.

b.      Des frontières peu conflictuelles

Les contentieux frontaliers dans l’UE restent de faible intensité[41], et les principaux litiges concernent le tracé des frontières maritimes, en lien avec les facilités de navigation ou l’accès aux ressources. Les contentieux sont plus vifs aux frontières externes de l’UE : Espagne/Maroc (îlot Persil), Grèce/Turquie (mer Égée), Chypre/Turquie (« ligne verte », France/Comores (Mayotte). Par ailleurs, le Brexit, cas sans précédent de départ d’un État de l’UE, pose le problème de la frontière entre l’Ulster et la République d’Irlande.

Enfin, le risque de sécession de certains territoires est faible mais pas inexistant : revendications indépendantistes (Catalogne, Écosse, Flandre, Corse), irrédentisme -Vocabulaire p.254 hongrois (Cf. territoires magyarophones situés en Slovaquie, en Roumanie et en Voïvodine serbe).

c.       Vers un rétablissement des frontières internes ?

Plusieurs États ont rétabli les contrôles aux frontières depuis 2015. La Suède, la France, le Danemark et l’Autriche justifient leur décision par la menace terroriste, l’afflux de migrants et la lutte contre les trafics (drogue, armes). Cette refrontiérisation -Vocabulaire p.252 à laquelle s’ajoute l’externalisation du contrôle des frontières à des États tiers et à des entreprises privées, fait l’objet de critiques de la part d’intellectuels et de militants. Ils dénoncent la « forteresse Europe » et la criminalisation de l’aide aux migrants dans un contexte de retour des nationalismes (Italie, Hongrie, Pologne).

2.     Les frontières européennes de l’Europe depuis 1990

Au fur et à mesure des élargissements -Carte p.257. L’évolution historique des frontières externes de l’UE, les frontières externes de l’Europe prennent des formes géographiques de plus en plus diverses : lignes comme la frontière Pologne/Biélorussie, points comme les lieux de contrôle au sein des ports et aéroports. Le contrôle aux frontières prend donc des formes variées, plus ou moins marquées, en fonction notamment des relations avec les pays tiers concernées, et du contexte diplomatique.

a.       L’élargissement de l’Union européenne, jusqu’où ?

Après la fondation de « l’Europe des Six » (Traités de Rome instaurant la CEE, 1957), les frontières de la CEE se sont d’abord été repoussées à l’intérieur du seul bloc de l’Ouest[42], dans un contexte de guerre froide (1947-1991). La chute du bloc socialiste ouvre la perspective de l’adhésion aux pays d’Europe centrale et orientale (PECO) : la CEE absorbe l’ex-RDA dès la réunification allemande en 1990, puis d’autres adhésions surviennent en 2004, 2007 et 2013. La longueur des frontières extérieures de l’UE augmente à chaque élargissement.

L’avenir des frontières de l’UE fait débat. La candidature à l’entrée dans l’UE des pays balkaniques, issus de l’ex-Yougoslavie, ne soulève plus guère d’opposition. En revanche, l’adhésion de la Turquie et de certaines anciennes républiques soviétiques (Moldavie, Ukraine, pays du Caucase) suscite des débats.

Les frontières de l’UE ne se superposent pas aux limites conventionnelles du continent. Ainsi,

  • Certaines régions situées hors du continent européen appartiennent à l’UE : enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, Régions ultra-périphériques (RUP)[43] -Vocabulaire p.254, Pays et Territoires d’Outre-Mer (PTOM)[44] -Dossier p.264-265. Les territoires ultramarins de l’UE : des frontières aux enjeux multiples.
  • Certains pays européens ont fait le choix de ne pas adhérer à l’UE : Norvège, Islande, Suisse, Liechtenstein. Le Royaume Uni quant à lui a choisi de quitter l’UE (« Brexit » voté en 2016).

b.      Un récent durcissement des frontières de l’UE

L’UE se caractérise par l’extension de ses barrières physiques. Sur le modèle de la frontière entre les enclaves -Vocabulaire p.254 espagnoles et le Maroc (murs, barbelés, miradors, caméras thermiques, patrouilles militaires), elles se sont étendues aux frontières orientales de l’UE (Bulgarie/Turquie, Grèce/Turquie, Hongrie/Serbie). Cette « barriérisation » -Vocabulaire p.252 vise à filtrer les flux de personnes. Elle s’est accentuée depuis 2015 suite à l’afflux de migrants dont beaucoup étaient des réfugiés politiques.

Cette fonction protectrice assignée aux frontières externes fait débat entre pays de l’Union européenne. Ainsi le groupe de Visegrad actuellement constitué de la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie défend des politiques très strictes de contrôle sur les migrations, mais ce sont les pays du Sud de l’Europe qui sont les plus exposés à l’arrivée de migrants par la mer, à l’origine de la mort de plusieurs milliers de personnes par noyade chaque année. Ces tensions, accentuées par le règlement de Dublin[45] mettent en péril le fonctionnement des accords de Schengen -Jalon p.262-263. Les enjeux de Schengen et du contrôle aux frontières : venir en Europe, passer la frontière.

La gestion des flux se diffuse au sein des territoires nationaux sous la forme de lieux de contrôle (aéroports, hotspots -Vocabulaire p.252) ou d’enfermement (zones d’attente, centres de rétention). Par ailleurs, l’UE délègue de plus en plus la fonction de contrôle de ses frontières. Les États membres de l’espace Schengen ont regroupé leurs moyens de surveillance (gardes-frontières, garde-côtes) au sein de l’agence Frontex -Vocabulaire p.252. Ils recourent aussi à l’externalisation -Vocabulaire p.254 du contrôle des flux auprès des États de transit ou de départ des migrants (Maroc, Turquie, Niger).

B.    Les frontières d’un État adhérent : l’Espagne

Jalon p.260-261. Les frontières d’un État adhérent : l’Espagne- Le cas des frontières d’un État adhérent et membre de l’espace Shengen permet de souligner la matérialisation ou non d’une frontière et d’élargir le cas de la frontière germano-polonaise. Plusieurs États peuvent se révéler particulièrement intéressants pour ce jalon et se prêter au rappel des fonctions des frontières étatiques : se protéger, se partager des territoires ou séparer deux systèmes politiques.

Ici, le cas de l’Espagne -doc.1 p.260. L’Espagne et ses frontières permet l’étude de frontières :

  • ouvertes et perméables avec le Portugal -doc.3 p.261. Une eurocité entre l’Espagne et le Portugal et la France (et jusqu’à présent avec le Royaume-Uni qui détient la souveraineté sur Gibraltar -doc.2 p.260. La frontière entre l’Espagne et Gibraltar face au Brexit, ainsi qu’avec la principauté indépendante d’Andorre !),
  • mais très surveillées en Méditerranée et matérialisées par des murs autour des enclaves de Ceuta et Melilla au Maroc -doc.4 p.261. Melilla : une frontière entre le Maroc et l’Espagne.

C.    Les espaces transfrontaliers intra-européens : passer et dépasser la frontière au quotidien

L’étude d’espaces transfrontaliers intra-européens souligne les conséquences de l’ouverture et du dépassement des frontières intra-européennes -Jalon p.258-259. Les espaces transfrontaliers européens : passer et dépasser la frontière au quotidien. Ici, la problématique sur les enjeux géopolitiques et les fonctions des frontières internes de l’Europe est abordée à travers l’analyse d’une forme spécifique de division politique : les espaces transfrontaliers.

En effet, l’ouverture des frontières intra-européennes a entrainé la formation d’espaces transfrontaliers européens, caractérisés par des échanges structurés, durables et par un certain nombre de traits communs de part et d’autre de la frontière. Les processus spontanés d’interactions transfrontalières sont nombreux :

  • Les différentiels de prix stimulent les achats transfrontaliers (Finlande/Estonie, Autriche/Hongrie).
  • Les différences de salaires favorisent les flux de travailleurs frontaliers (Français et Belges vers le Luxembourg, Français et Italiens vers la Suisse). Le passage de la frontière au quotidien indique que pour de nombreux « navetteurs » le travail et le domicile se trouvent dans deux pays différents.

Il est à noter que l’Union européenne vise un développement territorial spécifique qui ne repose pas uniquement sur l’exploitation des différentiels et cherche à mettre en place des formes de gouvernance transnationales comme les Groupements européens de coopération territoriale (GECT) -Vocabulaire p.254, qui gèrent et financent des infrastructures transfrontalières (hôpital franco-espagnol de Cerdagne). Les programmes Interreg soutiennent quant à eux des projets menés par des acteurs locaux en matière de recherche, de soutien aux PME, de gestion du patrimoine ou de santé (France/Suisse). Ce faisant, l’UE remet partiellement en cause les divisions politiques actuelles de l’Europe en États-nations.

Certains exemples d’espaces transfrontaliers à plus grande échelle choisis pour l’intensité de leurs échanges[46] peuvent s’avérer pertinents pour compléter l’étude, comme la frontière germano-polonaise aujourd’hui ou la frontière entre la France et la Belgique, le Luxembourg ou l’Allemagne.


[1] Didier Bigo, « Frontières, territoire, sécurité, souveraineté », CERISCOPE Frontières, 2011 (http://ceriscope.sciencespo.fr/content/part1/frontieres-territoire-securite-souverainete).

[2] Frontiérisation : augmentation du nombre de frontières.

[3] Expansion de l’Union soviétique, rétrécissement de la future Allemagne :

[4] https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-explicateur/20140318.RUE2751/a-votre-avis-combien-de-fois-l-europe-a-change-de-frontieres-en-25-ans.html

[5] Auguste, le premier empereur romain, se proposa de conquérir une province à laquelle il voulait précisément donner le nom de Germanie, entre le Rhin et l'Elbe. Il installa des légions sur la rive gauche du Rhin et d'autres troupes derrière le cours supérieur du Danube. Chaque année, des unités partaient de ces deux bases pour prendre les Germains en tenaille. En 9 après J.-C., le légat Varus y perdit la vie, et trois légions avec leurs auxiliaires furent anéanties. Auguste et ses compatriotes craignirent alors de voir les Germains ravager d'abord la Gaule puis l'Italie. Aussi décida-t-il de renoncer à toute nouvelle entreprise au-delà du Rhin et de placer derrière cette barrière naturelle des effectifs considérables, en tout huit légions et leurs auxiliaires, soit à peu près le tiers de l'armée impériale.

[6] Le mur d’Hadrien, constitué de blocs de pierre et de tourbe, s’étend sur 118 km ; sa hauteur moyenne est de 4,5 mètres.

[7] Au sud, entre Mayence et le Danube, ils élaborèrent une longue palissade de bois, sur 382 km, un ensemble si impressionnant que les Allemands, au Moyen Âge, l'ont appelé « le Mur du Diable ».

[8] Avant de constituer une ligne fortifiée fixe, le limes fut une « ligne nomade », c’est-à-dire un point de départ pour la conquête romaine.

[9] Sans compter un nombre équivalent de troupes auxiliaires (soldats qui ne sont pas des citoyens romains).

[10] Ils comptaient au nombre des rares salariés de l'Antiquité.

[11] On assiste à une course à la possession (« scramble for Africa ») où les deux puissances rêvent de conquête et de domination sur de grands axes méridiens : le Caire-Le Cap pour les Britanniques, Alger-Brazzaville pour les Français. La lutte pour le contrôle du Haut-Nil provoque l’incident de Fachoda (1898) où les deux puissances frôlent la guerre. Le projet français de relier les possessions d’Afrique occidentale à la mer Rouge (Djibouti) se heurte aux vues des Britanniques, qui veulent instaurer une continuité territoriale du Caire au Cap.

[12] Matérialisée par un mur, cette barrière frontalière, qui se veut hermétique, sert de ligne de séparation stricte, et sous contrôle militaire, de deux entités politiques opposées idéologiquement.

[13] En 1996, la Corée du sud est considérée comme un pays développé qui intègre l’OCDE

[14] Désertée par l’homme depuis soixante-dix ans, la DMZ est un écosystème singulier ; forêt profonde, tigre de Sibérie, léopard, grue du Japon dans les zones humides et les montagnes Taebaek.

[15] NB : on peut également souligner la singularité du paysage sonore, qui résulte de la diffusion continue par haut-parleurs de discours idéologiques par-dessus le mur.

[16] Une touriste a été abattue par une sentinelle nord-coréenne alors qu’elle s’était écartée de la zone autorisée.

[17] Cf. défilé commun des deux Corées et fusion des équipes féminines de hockey sur glace.

[18] C’est la première fois qu’un président des Etats-Unis foule le sol de la Corée du Nord.

[19] À écouter : le podcast de la revue Conflits (avril 2019).

[20] Plus largement, le traité de Versailles contraint la République de Weimar à restituer l’Alsace-Lorraine à la France, sépare Dantzig du reste de l’Allemagne par le fameux corridor, et impose l’abandon des territoires prussiens les plus orientaux et celui des colonies et des frontières ultramarines.

[21] Qu’en est-il plus précisément pour l’Allemagne ? Les limites septentrionales maritimes (la mer du Nord et la mer Baltique, hormis les 68 km qui séparent le pays du Danemark) et méridionales montagneuses (les Alpes, les Monts métallifères de Bohème, la forêt de Bavière) semblent claires. Il n’en va pas de même des limites orientales et occidentales.

[22] Görlitz est une des villes coupées en deux par la frontière.

[23] Dès 1945, l’objectif premier de la diplomatie polonaise est la reconnaissance par la communauté internationale de la ligne Oder-Neisse. Le gouvernement provisoire polonais (1945-1947) puis le gouvernement communiste à partir de 1948 élaborent un discours argumenté pour justifier le tracé de la nouvelle frontière. Les autorités polonaises s’appuient ainsi sur les travaux de spécialistes polonais qui font partie d’un courant historiographique, la « pensée occidentale polonaise ». Ce dernier cherche à justifier, par l’histoire et les sciences humaines, la polonité des régions annexées, qualifiées de « territoires recouvrés ». En se fondant sur ces travaux universitaires qui sont également des œuvres de propagande, les autorités polonaises multiplient les offensives diplomatiques pour faire reconnaître la frontière sur la ligne Oder-Neisse.

[24] La Loi fondamentale est le terme employé pour désigner la Constitution de la RFA (1949).

[25] Avant même la constitution de la RFA en mai 1949, les deux principaux partis ouest-allemands, la CDU et le SPD, tiennent une position ouvertement révisionniste sur la question.

[26] Similairement à ce qui se passe en Pologne, la diplomatie ouest-allemande, s’appuie sur des travaux scientifiques pour justifier la germanité des anciennes provinces orientales du IIIe Reich perdues en 1945. Ouvertement révisionnistes à l’égard de la frontière Oder-Neisse, ces chercheurs glorifient le passé prétendument exclusivement allemand de ces territoires et présentent la conférence de Potsdam comme une injustice historique. On trouve dans leurs œuvres une idéologisation de l’histoire identique à celle des représentants de la pensée occidentale polonaise.

[27] La RDA repousse la limite de ses eaux territoriales unilatéralement, en se fondant sur le droit international maritime, de sorte que cette dernière mord sur le canal d’accès aux ports de Szczecin et de Świnoujście, importants centres d’exportation, remettant ainsi en cause les intérêts économiques polonais.

[28] …dont le chancelier Helmut Kohl.

[29] Plus précisément, il s’agit du « Traité portant règlement définitif concernant l’Allemagne ».

[30] Sur la mer territoriale, le plateau continental, les activités de pêche et la conservation des ressources biologiques en haute mer.

[31] Ces négociations ont révélé des intérêts géopolitiques contradictoires : les grandes puissances maritimes comme les États-Unis ou le Royaume-Uni insistent sur la libre-circulation maritime afin que leurs flottes civiles et militaires puissent continuer à agir librement sur l’océan mondial. Les pays en développement, récemment indépendants dans les années 1970 et numériquement majoritaires, cherchent à s’approprier ces espaces maritimes et leurs ressources pour leur développement. Finalement, la convention de Montego Bay est l’objet d’un compromis remarquable entre liberté de navigation et appropriation des mers. En témoignent les différentes formes et fonctions que remplissent les délimitations maritimes actuelles, avec des droits associés à chacune des zones maritimes.

[32] NB : la CNUDM n’est pas le seul traité maritime, des accords spécifiques sont également conclus dans le cadre de l’Organisation maritime internationale (OMI). Cette institution spécialisée des Nations Unies, chargée d’assurer la sécurité et la sûreté de la navigation maritime et de prévenir la pollution des mers, regroupe, elle, la totalité des États côtiers du monde.

[33] Un mille marin mesure 1852 m (NB : ne pas confondre avec un mile, unité de mesure anglo-saxonnes mesurant 1609 m).

[34] Les rades, les baies, les ports qui sont en-deçà du trait de côte forment les eaux intérieures, qui ont un régime juridique identique au territoire terrestre, avec une pleine souveraineté pour l’État. Il s’agit du seul espace maritime où l’État dispose de la pleine souveraineté politique.

[35] La plate-forme continentale ou plateau continental est un replat marin à pente faible, compris entre le littoral et le talus continental qui plonge vers des profondeurs voisines de 200 m. Sa largeur peut osciller de quelques kilomètres à plus de 1 000 km. Son modelé hérité de formes terrestres immergées est soumis à l’accumulation sédimentaire (source : Géoconfluences).

[36] Or, même les États-Unis ont défendu ab initio la convention et agissent actuellement, par exemple en mer de Chine, pour favoriser la libre-circulation de leurs navires.

[37] Le territoire maritime de la France, avec 11 millions de km², est au deuxième rang mondial derrière celui des États-Unis. Au total, elle a des frontières maritimes avec trente pays. La France est par exemple particulièrement attachée à la ZEE offerte par l’île de Clipperton, qui lui offre un espace maritime équivalent à 80% de la totalité de son territoire terrestre ainsi qu’une zone particulièrement riche en ressources thonidées et en nodules polymétalliques.

[38] En effet, l’UE a adopté un tarif extérieur commun, valable pour tous les échanges extra-communautaires.

[39] Dans le même temps, l’UE fonctionne comme une zone de libre-échange, dépourvue de droits de douanes pour les échanges entre États membres.

[40] L’instauration du marché unique (1993) permet la libre circulation des marchandises, des capitaux et des services. L’euro, monnaie unique depuis 2002, est adopté progressivement par les nouveaux États membres.

[41] Par exemple, le désaccord sur le tracé exact de la frontière sur le mont Blanc ne provoque aucun incident diplomatique entre la France et l’Italie.

[42] Cf. Élargissement à la Grèce, au Portugal et en Espagne (1981 et 1986) après la chute de leurs dictatures.

[43] Les RUP font partie de l’UE. La réglementation de l’UE s’y applique. Elles appartiennent à la France (Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, La Réunion, Saint-Martin), à l’Espagne (Canaries) et au Portugal (Madère, Açores). Les RUP françaises ne participent pas à l’espace Schengen.

[44] Les PTOM ne font pas partie de l’UE mais lui sont associés. C’est le cas des possessions du Danemark (Groenland), du Royaume-Uni (Falkland, Bermudes, Anguilla…), des Pays-Bas (Sint-Maarten, Aruba…) et de la France (Polynésie, Nouvelle-Calédonie, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna). Leurs habitants sont néanmoins citoyens de l’UE.

[45] Cf. C. Vinet, « Comprendre le règlement de Dublin en trois minutes », Le Monde, 7 juin 2018.

[46] http://www.espaces-transfrontaliers.org/

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