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Sommaire

INTRODUCTION
I. L’AFFRONTEMENT ENTRE BYZANTINS ET ARABO-MUSULMANS (VIIe-Xe SIÈCLE)
A. FACE À L’EMPIRE BYZANTIN, UN MONDE ARABO-MUSULMAN EN EXPANSION
B. LA RÉSISTANCE BYZANTINE FACE AUX ARABES, PUIS FACE AUX TURCS

II. UNE MÉDITERRANÉE QUI TEND À DEVENIR LATINE (Xe-XIIIe SIÈCLE)
A. BERNARD DE CLAIRVAUX ET LA DEUXIÈME CROISADE (1146-1149)
1. Une campagne militaire au succès mitigé
2. Les enseignements de la deuxième croisade
B. VENISE, GRANDE PUISSANCE MARITIME ET COMMERCIALE
1. Le développement de la ville et l’expansion commerciale
2. Évolution de l’espace et du patrimoine urbain

Manuel p.60-85

Introduction

Carte 1 p.62. La Méditerranée au XIIe siècle, entre affrontements et échanges + Chronologie p.63- On peut distinguer, dans l’histoire de la Méditerranée médiévale, trois grandes périodes : une période dominée par l’affrontement entre Byzantins et Arabo-musulmans du VIIe au Xe siècle ; une période durant laquelle les Occidentaux prennent une place plus importante, entre combats et développement du commerce du Xe au début du XIIIe siècle, avant que s’installe une domination latine quasiment sans partage jusqu’au développement de la puissance turque à la fin du XVe siècle.

Dans quelle mesure la Méditerranée est-elle un enjeu et un espace spécifiques pour les différents pouvoirs et religions, entre volonté de domination et nécessité de cohabitation ?

I.  L’affrontement entre Byzantins et Arabo-musulmans
(VIIe-Xe siècle)

L’Empire byzantin maintient l’héritage gréco-latin en Méditerranée. Constantinople, la seconde Rome, est la capitale de l’empereur, le basileus, représentant de Dieu sur terre. À partir du schisme -Vocabulaire p.65 de 1054, la chrétienté est partagée entre catholiques, sous l’autorité spirituelle de l’Église de Rome, et orthodoxes -Vocabulaire p.65, sous l’autorité du patriarche de Constantinople -Vocabulaire p.65.

A.    Face à l’Empire byzantin, un monde arabo-musulman en expansion

Sortis victorieux mais affaiblis des guerres perses (602-628)[1], les Byzantins subissent les premiers raids arabes dès 632, sous l’impulsion des successeurs du prophète Mahomet (571-632). Né au VIIe siècle en Arabie -Info p.64. Le Coran, l’islam est une religion monothéiste qui s’est répandue grâce aux conquêtes menées au nom du Djihad -Vocabulaire p.64. Les califes -Vocabulaire p.64 « bien guidés » puis omeyyades, multiplient les victoires : en 636, ils contrôlent la Syrie-Palestine ; en 641, l’Égypte. Si le siège de Constantinople (674-678) échoue, ils l’emportent ailleurs, de la Perse jusqu’à l’Espagne. La civilisation musulmane, qui s’épanouit sur les rives de la Méditerranée, est essentiellement urbaine -doc.2 p.68. Une brillante civilisation urbaine, dans de grandes villes comme Bagdad, Le Caire ou Cordoue, qui sont des pôles de prospérité et de culture où exercent des savants -Biographie p.68. Averroès disposant de vastes bibliothèques comprenant les œuvres gréco-latines.

B.    La résistance byzantine face aux Arabes, puis face aux Turcs

Les attaques musulmanes reprennent au début du VIIIe siècle. Le nouveau siège de Constantinople, en 717-718, se solde par un nouvel échec. La reconquête peut alors commencer, au VIIIe siècle avec les empereurs iconoclastes[2] qui ouvrent la voie à la reconquête de l’Anatolie, entreprise au IXe siècle par la dynastie macédonienne, avec Basile Ier (867-886) et ses successeurs, artisans de la « Renaissance Macédonienne ». Ce n’est toutefois qu’avec la campagne victorieuse de l’empereur Jean Ier Tzimikès (969-976) jusqu’à Jérusalem en 975, que les Byzantins prennent le dessus, profitant des divisions du monde musulman : en effet, celui-ci se morcelle, par un schisme religieux dès le VIIe siècle entre sunnites et chiites -Ne pas confondre p.65, et par des divisions politiques à partir du Xe siècle[3].

À la mort de Basile II en 1025, l’Empire byzantin est la première puissance au Moyen-Orient. Mais par la suite, l’instabilité politique et les guerres civiles affaiblissent l’Empire. Incapable d’empêcher l’expansion turque qui supplante la menace arabe, il laisse aux Seldjoukides l’essentiel de l’Anatolie après la défaite de Mantzikert (1071). C’est alors qu’intervient la première croisade (1095-1099) -Vocabulaire p.64.

II. Une Méditerranée qui tend à devenir latine (Xe-XIIIe siècle)

Du Xe au XIIIe siècle, les Occidentaux latins prennent le contrôle de la mer et imposent leur puissance face à un Empire byzantin affaibli et un monde arabo-musulman divisé. Au cœur de cette mutation, les attributs du pouvoir et de la civilisation chrétienne d’Occident : la religion catholique, la puissance militaire, et la puissance économique.

A.    Bernard de Clairvaux et la deuxième croisade (1146-1149)

En 1095, le pape Urbain II -Biographie p.66 lance la première croisade, pour libérer la Terre sainte des musulmans. Des milliers de chrétiens issus du peuple prennent alors le chemin de Jérusalem -Dossier p.74-75. De la source à l’histoire. En chemin, ils s’en prennent aux juifs et aux byzantins avant d’être écrasés par les Turcs en 1096. Les grands barons, partis dans un second temps, s’emparent de Jérusalem en 1099. Implantés en Syrie et en Palestine, ils créent quatre principautés : Tripoli, Antioche, Édesse et Jérusalem, qui sont les premières implantations occidentales hors d’Europe, et qui sont le théâtre à la fois d’affrontements et d’échanges -Carte 2 p.63. Les États latins d’Orient.

1.     Une campagne militaire au succès mitigé

Mais les musulmans s’unissent et lancent le Djihad, qui connaît alors un renouveau, contre les royaumes latins dès le milieu du XIIe siècle. La prise d’Édesse en 1144, entraîne la deuxième croisade prêchée par Bernard de Clairvaux -PDP p.70-71. Bernard de Clairvaux et la deuxième croisade (1146-1149). L’expédition militaire, conduite par le roi de France Louis VII et l’empereur germanique Conrad III, passe par Constantinople où des tensions l’opposent à l’empereur byzantin Manuel Ier Comnène, avant d’être défaite par les Turcs seldjoukides en Anatolie et par Nur ad-Din à Damas. Échec militaire en Terre sainte[4]-Carte 3 p.71. L’itinéraire de la deuxième croisade en Orient, la deuxième croisade est plus fructueuse en Europe du Nord et en Espagne, où la Reconquista -Vocabulaire p.67 + Carte 3 p.63. L’Espagne de la Reconquista est amorcée.

2.     Les enseignements de la deuxième croisade

La deuxième croisade est riche d’enseignements : en effet, le discours religieux et le rôle d’encadrement joué par la papauté dans la croisade reflètent le moment de rupture vécu par l’Occident au XIIe. Cette rupture découle de la mise en place de la réforme grégorienne[5]. Autrefois, les historiens parlaient de la « renaissance du XIIe siècle » comme d’un phénomène accompagné d’un essor démographique et économique et d’une expansion de la Chrétienté. Certes, le XIIe siècle est le siècle des premières cathédrales gothiques, des croisades, et de la Reconquista, la conquête de l’Espagne par les chrétiens sur les musulmans. Mais, plutôt qu’une « renaissance », ce long XIIe siècle[6], apparaît comme un temps de rupture entre deux Moyen-Âge. Au premier Moyen Age caractérisé par la ruralité, l’hégémonie du monachisme bénédictin, une Église encore largement soumise à la domination seigneuriale des laïcs succède un second Moyen Age caractérisé par l’essor urbain, la diversité des formes de vie religieuse et une Église de plus en plus autonome des pouvoirs civils au point de prétendre, avec la papauté à sa tête, gouverner la société chrétienne.

B.    Venise, grande puissance maritime et commerciale

Venise est un lieu et un acteur majeur, soulignant l’émergence des Latins et leur prise de contrôle, au moins économique, de la Méditerranée.

1.     Le développement de la ville et l’expansion commerciale

À partir du Ve siècle, des populations vénètes se réfugient sur les îlots sablonneux de la lagune pour échapper aux incursions barbares, puis les habitats précaires deviennent progressivement des établissements permanents, et ce qui n’était qu’un refuge devient à partir du Xe siècle une des grandes capitales du monde médiéval.

Venise a assuré très tôt, grâce à ses navires, un service de transport, d'abord dans la lagune, puis dans le golfe Adriatique. Ensuite, dès le Xe siècle, son réseau s'est étendu à la Méditerranée orientale et, au XIIe siècle, à toute la Méditerranée. Au début, la ville ne peut compter que sur les produits de ses proches campagnes. Mais elle extrait du sel, première source d'enrichissement pour ses entrepreneurs. Le sel et le navire sont ainsi les deux fondements de cette prospérité très ancienne.

Dès le milieu du IXe siècle, les Vénitiens ont commencé à traiter avec les deux grands empires entre lesquels ils sont situés : l'Empire carolingien et l'Empire byzantin -dont elle fait partie. En 1082, ils obtiennent de Byzance des droits et des positions de commerce privilégiées -Doc.1 p.72. Les privilèges accordés aux Vénitiens par le chrysobulle de 1082 + Carte 2 p.76. Le commerce de Venise à la fin du XIIe siècle. En effet, Venise a des possessions outre-mer, de plusieurs types :

  • Les premières sont des quartiers de villes où les Vénitiens ont obtenu des droits particuliers qui leur permettent de reconstituer de petites Venise : c'est le cas à Constantinople -doc.5 p.73. Plan de Constantinople ou à Alexandrie par exemple. Dans ces « fondouks », les Vénitiens jouissent de la liberté de commerce, mais ils ont aussi la possibilité de s'installer, de construire des églises et de vivre avec leurs propres institutions.
  • À ces comptoirs de commerce s'ajoutent des territoires acquis de diverses manières, comme ceux pris à l'Empire byzantin, à la suite de la quatrième croisade (1202-1204)[7] -doc.4 p.73. Le sac de Constantinople. Venise contrôle la Dalmatie, de nombreuses régions de la Grèce continentale et d'îles comme Chypre[8] ou la Crète[9].

Carte 2 p.76. Le commerce de Venise à la fin du XIIe siècle- À partir du XIIIe siècle, Venise pourvoit l'Occident en produits venus de loin nécessaires à son industrie : l'alun d'Asie Mineure, employé en teinture pour fixer les colorants, et le coton syrien pour les textiles fins ; un approvisionnement extraordinaire d'épices d'Orient, de soie grège et de soieries. Soies et épices représentent l'extrême pointe d'un commerce lointain et la contrepartie d'un commerce de masse qui porte d'abord sur des marchandises pondéreuses, comme le sel et le bois de son arrière-pays. Venise a fourni en bois de construction navale de nombreux États des deux rives de la Méditerranée. Les céréales, d'Italie méridionale, des Balkans et de Crète, y tiennent une large place, non seulement parce que Venise a joué un rôle de liaison entre des régions distantes, mais aussi parce qu'elle a eu besoin de nourrir son propre empire dispersé. S'y ajoutent tous les métaux, fer et métaux précieux. Venise est admirablement située, à une distance assez facile à parcourir des grands centres miniers de l'Europe centrale et orientale. C'est l'une des bases de sa puissance en Méditerranée car les métaux précieux sont à la fois une marchandise et un moyen de paiement. Dans les années 1420, Venise voit passer sur ses quais à peu près 4 tonnes d'or et une trentaine de tonnes d'argent fin par an.

L’État vénitien offre aux marchands une sécurité qui leur permet d'exercer leur métier dans les meilleures conditions. Il organise la muda, c'est-à-dire les convois de galères qui partent plusieurs fois par an dans différentes directions et comportent un nombre de bateaux fixé selon les objectifs et les destinations[10]. À partir du XIVe siècle, des trains de galères sont affrétés par le détroit de Gibraltar vers les ports occidentaux, principalement Londres et Bruges, avec lesquels sont mises en place des liaisons régulières. C'est une sécurité dans un commerce soumis aux aléas de la piraterie : armés, les convois de Venise sont les plus sûrs de la Méditerranée occidentale.

L’expérience vénitienne démontre la complexité et le caractère fluctuant des contacts, entre commerce, échanges et conflits -doc.3 p.77. Une puissance mal acceptée dans la Méditerranée médiévale.

2.     Évolution de l’espace et du patrimoine urbain

Le commerce est présent partout dans le tissu urbain.

Dès le XIVe siècle, tout le quartier du Rialto est composé de magasins où s'entassent des produits industriels. Même les magnifiques palais que l'on voit aujourd'hui encore lorsque l'on se promène sur le Grand Canal sont marqués par les activités marchandes : beaucoup comportent un rez-de-chaussée directement accessible à des embarcations, qui fut durablement un lieu d'entrepôt des marchandises, et, à l'étage, le bureau, où se tenaient les hommes d'affaires, où l'on conservait les archives, et certaines pièces luxueuses. Parmi les palais les plus somptueux, citons la Ca' d'Oro (Maison d'Or), construite au début du XVe siècle pour Marino Contarini, et ainsi nommée en raison des dorures et de la polychromie de la façade. Outre le travail des perles, l’orfèvrerie, la mode (Venise est la capitale mondiale de la mode jusqu’au XVIIIe siècle), la soierie est vendue au plus proche du monde des affaires, du Rialto, et les marchands présentent à la montre les tissus somptueux qu'ils produisent. Tout près se trouve le fondaco dei Tedeschi, le caravansérail où les marchands du Nord, de Bruges à Cracovie, sont tenus de résider et de stocker leurs marchandises, notamment les métaux précieux. Le contrôle étroit de leurs transactions s'étend jusqu'aux entrepôts du quartier loués pour une longue durée.

Derrière l'activité déployée sur le Grand Canal ou à proximité, se trouvent d'autres paysages urbains très actifs :

  • l'Arsenal, entrepôt, chantier naval et fabrique d'armements, soigneusement enfermé dans ses murailles car la puissance de l'État s'abrite derrière le secret, est un des plus grands chantiers du monde (un millier de personnes sont employées vers 1500) et un des mieux organisés, qu'il s'agisse de la production des galères ou de l'équipement de l'artillerie ;
  • des quartiers excentrés, plus tardivement asséchés, où est cantonnée l'industrie, ateliers où l'on traite les cuirs et peaux, le suif, lieux d'étendage des toiles, magasins où s'entasse le bois destiné aux chantiers navals ; certains secteurs sont entièrement dédiés au textile, au travail de la laine, où dominent les travailleurs étrangers.

Mais la basilique Saint-Marc -doc.4 p.77 + Le saviez-vous ? p.66 est sans doute le monument le plus représentatif du rôle singulier joué par Venise entre Orient et Occident.


[1] L’Égypte, ainsi que la Syrie-Palestine sont conquises par les Perses en 619. La prise de Jérusalem a des répercussions symboliques considérables (destruction du Saint-Sépulcre, la prise de la Vraie Croix). De 626 à 627, les Perses échouent à prendre Constantinople, puis l’empereur Héraclius profite de leurs divisions et finit par les vaincre en 628 ; il se rend en personne à Jérusalem en 630 pour y déposer la Vraie Croix récupérée.

[2] Léon III, Constantin V, Léon V l’Arménien (813-820) ou Théophile (829-842). Fortement marqué par la lecture de l’Ancien Testament, Léon III voit dans le développement du culte des images une des raisons de l’affaiblissement de l’Empire : pour lui, les Byzantins, nouveau peuple élu, ont perdu le soutien de Dieu, car ils se livrent à l’adoration des images. D’où son opposition aux images. Pour Léon III et son fils Constantin V (741-775), l’iconoclasme est donc une katharsis, une purification, nécessaire pour éviter le sort réservé à Israël. S’ensuit une alternance entre iconoclasme (730-787 et 815-848) et iconodoulie (787-815)

[3] Dans le sud de l’Espagne et au Maghreb s’étend l’empire des Almoravides, auxquels succèdent en 1147 les Almohades. En Égypte, le califat fatimide résiste aux Turcs seldjoukides, qui font irruption au Moyen-Orient au XIe siècle.

[4] Non seulement Édesse n’est pas reprise, mais par la suite Jérusalem et l’essentiel des États latins d’Orient seront repris par Saladin, le sultan d’Égypte -Biographie p.67.

[5] Réforme de l’Église engagée à partir du milieu du XIe siècle et principalement menée par les papes. Grégoire VII (1073-1085) en est le principal instigateur. Elle se traduit par l’autonomie et la puissance croissantes de l’Église, et engage une profonde recomposition des relations entre clercs et laïcs dans tous les domaines de la vie sociale, au profit des premiers.

[6] De Grégoire VII (1073-1085) au concile du Latran IV en 1215.

[7] Lancée par le pape Innocent III en 1198, elle fut détournée de son but initial, les lieux saints, par les chefs de guerre qui avaient négocié avec Venise le transport maritime à un prix qu'ils ne purent payer : l'armée, bloquée au Lido, dut accepter de s’emparer de Constantinople en 1204 après un siège sanglant.

[8] Chypre est une colonie d'exploitation, productrice de sucre notamment.

[9] La Crète fournit des matières premières capitales pour l'économie européenne, comme le coton. Son blé permet à Venise d'approvisionner ses propres colonies dispersées ; le vin crétois alimente un important trafic en Méditerranée orientale.

[10] La muda du coton, par exemple, est planifiée en fonction de la date de la récolte en Syrie et des quantités à transporter.

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